Le gouvernement s'apprête à initier les discutions portant le projet de la réforme des retraites. Il pourrait bien utiliser l'article 47.1 de la Constitution. Qu'en est-il vraiment?
L'utilisation du 47.1 comme outil juridique pour forcer l'adoption de la réforme des retraites
Le gouvernement est en préparation en vue du débat parlementaire pour l’adoption de la réforme des retraites. Malgré l’opposition, les manifestations et le barrage intersyndical, l’exécutif est décidé à présenter son projet de loi, qu’il estime d’ailleurs nécessaire pour sauver le système des retraites. Il s’agit en réalité d’un choix politique. Un problème persiste cependant : le débat parlementaire à l’Assemblée nationale risque de durer, voire de bloquer les plans présidentiels.
Célèbre pour son utilisation jusqu’à 10 reprises de l’article 49.3 qui permet d’engager la responsabilité du gouvernement sur une loi en cas de refus d’adoption de la part de l’Assemblée, Elisabeth Borne semble avoir trouvé un nouvel outil juridique qui pourrait bien l’aider. Il s’agit de l’article 47.1. Celui-ci est restreint dans son utilisation aux « projets de loi de financement de la Sécurité Sociale ». Et la réforme des retraites y correspond puisqu’elle est insérée dans un projet de loi de financement de la Sécurité sociale rectificative (PLFSSR).
Cet article aurait une utilité particulière puisqu’il viendrait imposer une limite de temps de 50 jours au débat, limitant ainsi l’action de correction et de modification du projet de loi initial. Ainsi, si l’Assemblée ne prend pas de décision en première lecture 20 jours après l’ouverture des discussions, alors le gouvernement fait appel au Sénat.
La négociation du projet de loi pourrait être coupée court à l'Assemblée
Or, comme on le sait, le Sénat a une majorité politique du parti Les Républicains. Suite à une négociation de plusieurs articles, ceux-ci semblent prêts à voter le texte. Le gouvernement leur a fait trois concessions : le report de l’âge légal, la revalorisation des petites pensions à 85% du SMIC et l’abandon du transfert de recouvrement des cotisations du régime de retraite complémentaire Agirc-Arrco vers la Sécurité sociale.
De quoi satisfaire les élus qui prônent cette politique depuis de nombreuses années. Dans le cas d’un désaccord entre Sénat et Assemblée, une commission paritaire sera alors créée qui constituera un texte sur les discussions. Présenté à nouveau aux deux chambres, le texte ne pourra alors pas être modifié sans l’aval du gouvernement. Alors qu’elle n’a encore jamais été utilisée au cours de la Ve République, cette disposition fait penser pour certains députés, notamment LFI, à un article 49.3 déguisé, qui brusquerait l’examen du pouvoir législatif au détriment du débat démocratique.