Alors que le Parlement examine une nouvelle proposition pour réguler la démographie médicale, une frange importante des professionnels de santé, parmi lesquels SOS Médecins, choisit la grève.
SOS Médecins en grève contre la loi Garot

Le 29 avril 2025, l’antenne du Cotentin de SOS Médecins suspend ses activités pendant une journée entière, s’associant à une mobilisation nationale. Ce mouvement intervient alors que l'Assemblée nationale étudie une proposition de loi visant à mieux répartir les professionnels de santé sur le territoire français. Cette mobilisation offre un éclairage politique sur la complexité du combat contre les déserts médicaux.
Une mobilisation nationale qui dépasse le seul cadre médical
Le mouvement initié par SOS Médecins s'inscrit dans une dynamique plus large qui rassemble internes, jeunes médecins et étudiants. À travers cette grève, ces acteurs expriment leur opposition à la proposition de loi portée par Guillaume Garot et d’autres parlementaires de différentes sensibilités politiques.
À Cherbourg-en-Cotentin, Christophe Marchenay, président local de SOS Médecins, justifie l'arrêt total des activités par une volonté d'alerter sur l'impact potentiel de ce texte : « Ce n’est certainement pas maintenant, à l’heure où 87 % de la population vit dans un désert médical, qu’il faut mettre des contraintes d’installation aux médecins. C’est complètement contre-productif » (Ouest-France, 28 avril 2025).
Cette contestation traduit la crainte que la régulation administrative devienne un facteur aggravant de la crise d’accès aux soins plutôt qu'une solution.
Le contenu et les ambitions de la loi Garot
La proposition de loi n°966, enregistrée le 13 février 2025 à l’Assemblée nationale, entend instaurer une procédure d'autorisation préalable pour toute installation de médecins dans des territoires jugés déjà suffisamment pourvus.
Portée par une coalition transpartisane, elle répond à un diagnostic partagé : la fracture territoriale en matière de soins s'accentue, menaçant l’égalité d’accès aux services publics. L’enjeu politique est clair : répondre aux attentes des élus locaux et des populations rurales, souvent laissées à l'écart du maillage médical.
Cependant, du côté des syndicats de médecins, l'inquiétude grandit. Selon Hervé Pourcelot de SOS Médecins Besançon, « cela touche au caractère libéral de notre profession, à notre liberté d'exercice » (France 3 Régions, 28 avril 2025).
Les professionnels craignent que des mesures perçues comme coercitives ne découragent les nouvelles générations de médecins de s'engager dans l'exercice libéral, voire d'exercer en France.
Une grève symbolique aux conséquences locales immédiates
Dans le Cotentin, la fermeture de SOS Médecins pour 24 heures aura des effets immédiats sur l'accès aux soins non programmés. Les patients devront se tourner vers les urgences hospitalières ou différer des soins habituellement pris en charge rapidement par cette structure.
Cette action vise à illustrer concrètement les effets possibles d'une réduction de la présence médicale, si les mesures de régulation venaient à réduire l'attractivité du métier.
Pour Frédéric Bastian, président d'honneur de SOS Médecins Cotentin, la situation est préoccupante : « À part dépeupler la population de médecins généralistes, je ne vois pas l’intérêt de cette coercition » (Actu.fr, 28 avril 2025).
Le choix d'une grève totale, plutôt qu'une action partielle ou symbolique, montre la détermination des acteurs du terrain à peser dans le débat public.
Un débat politique structurant pour l'avenir de l'accès aux soins
La lutte contre les déserts médicaux est désormais un enjeu politique central. Si le gouvernement et une partie des parlementaires défendent l’idée d’un encadrement plus strict des installations, d’autres voix au sein de l'Assemblée nationale plaident pour des approches plus incitatives, comme des avantages financiers ou des simplifications administratives.
Ce débat pose des questions fondamentales : jusqu’où peut-on intervenir dans les choix professionnels individuels au nom de l'intérêt général ? Comment maintenir un équilibre entre solidarité territoriale et attractivité des métiers de la santé ?
Alors que la proposition de loi Garot poursuit son parcours législatif, l’issue du débat déterminera non seulement l’évolution de la démographie médicale, mais aussi le rapport des praticiens à la régulation de leur exercice.