Dans un monde où le numérique prend de plus en plus de place, l’Autriche fait un pas audacieux en envisageant d’inscrire le droit à l’argent liquide dans sa Constitution. Une démarche qui soulève de nombreuses questions et qui s’inscrit dans une tendance européenne de défense des paiements en espèces.
Argent liquide : vers un droit constitutionnel
La décision audacieuse du chancelier autrichien
Le chancelier autrichien, Karl Nehammer, a exprimé sa volonté d'inscrire le « droit à l'argent liquide » dans la Constitution du pays. Cette démarche, bien que symbolique, est soutenue par une majorité de la population autrichienne. En effet, chaque année, 47 milliards d'euros sont retirés des distributeurs automatiques en Autriche, et en moyenne, chaque citoyen transporte 102 euros en espèces. Cette initiative fait suite à une pétition lancée par deux citoyens autrichiens, qui a recueilli près de 500 000 signatures, plaidant pour le droit de payer en espèces sans restriction.
Alors que les paiements numériques gagnent du terrain en Europe, certains pays, comme l'Autriche, restent attachés à l'argent liquide. En France, par exemple, 50% des paiements en points de vente en 2022 étaient effectués en espèces, contre 57% en 2019. Cependant, l'utilisation croissante des paiements par carte, notamment grâce à la généralisation du paiement sans contact et au développement de plateformes comme Google Pay et Apple Pay, soulève des questions sur la vie privée. En effet, les entreprises de paiement par carte, telles que Visa et Mastercard, collectent et commercialisent les données liées aux transactions.
L'Autriche : un bastion de la défense de l'argent liquide
L'Autriche se distingue des autres pays européens par son attachement à l'argent liquide. Karl Nehammer a proposé d'ancrer l'utilisation de l'argent liquide dans la Constitution pour apaiser les inquiétudes concernant la disparition potentielle du droit des citoyens à utiliser des espèces. Selon un plan en trois points, non seulement le droit à l'argent liquide serait protégé constitutionnellement, mais la Banque nationale serait également tenue de fournir les liquidités nécessaires pour soutenir l'économie monétaire. De plus, les banques seraient obligées d'implanter des points de vente à proximité des citoyens pour garantir la possibilité de paiements en espèces pour tous.
La disparition progressive de l'argent liquide est un sujet de préoccupation dans de nombreux pays européens. Alors que certains pays, comme la Suède, aspirent à devenir des sociétés sans espèces, d'autres, comme l'Autriche et l'Allemagne voisine, restent attachés aux paiements en espèces, en particulier pour les petites transactions quotidiennes. Nehammer a souligné que 67% des paiements en Autriche de moins de 20 euros sont effectués en espèces. Pour lui, « l'argent liquide est un moyen de paiement élémentaire » et il est essentiel de créer un cadre juridique clair pour le protéger.