Grève : jusqu’où iront les médecins libéraux ?

Les revendications de l’intersyndicale des médecins libéraux sont claires. La grève débutera ce vendredi 13 octobre 2023 : jusqu’où les médecins libéraux sont-ils prêts à aller ?

Axelle Ker
Par Axelle Ker Publié le 12 octobre 2023 à 18h00
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70 à 80 % des cabinets fermeront leurs portes à partir de ce vendredi 13 octobre 2023 selon les estimations de l'intersyndicale des médecins libéraux.

Jusqu'où ira la grève des médecins libéraux ? 

« Nous avons bloqué nos agendas, et dans notre cabinet de Guidel, c'est zéro rendez-vous à partir de vendredi... il faudra se rendre aux urgences, qui risquent d'être dramatiquement surchargées », averti Mélanie Rica-Henry, médecin généraliste et présidente du collectif Médecins. En effet, comme l'a indiqué Philippe Cuq, porte-parole de l'intersyndicale des médecins libéraux, lors d'une conférence de presse, mardi 10 octobre 2023 :  « à compter du 13 octobre, la médecine libérale va s’arrêter (...) toutes les activités médicales et les consultations seront déprogrammées, les urgences transférées à l’hôpital, et la permanence des soins ne sera pas assurée. On verra alors les conséquences sur l’accès aux soins ».

Cette action radicale n'a pas été prise à la légère. En témoigne le sentiment de Philippe Cuq : « Nous le faisons la mort dans l’âme, mais nous n’avons pas d’autre solution ». L'ensemble des syndicats de la profession ont répondu positivement à l'appel de la grève. Les médecins libéraux représentant près de 56 % des médecins en exercice, il est donc possible que la moitié des cabinets soient fermés, à partir de ce vendredi 13 octobre 2023, et ce, pour une durée indéterminée.

Des revendications claires pour une médecine sous tension

La première revendication de l'intersyndicale : l'augmentation des tarifs de consultation. « Nos cabinets, qui sont des petites entreprises libérales, ne peuvent pas vivre avec des tarifs qui, pour certains, datent de 1990 », souligne Philippe Cuq. En ce sens, l'intersyndicale demande la renégociation de la convention médicale qui fixe le tarif de consultation avec l'Assurance maladie. Les dernières négociations ont, en effet, apporté une augmentation bien maigre et en deçà de la demande des médecins libéraux  : +1,5 euros par consultation, contre 5 euros demandés.

La seconde revendication des médecins libéraux : la réécriture de la loi Valletoux. Destinée à pallier le problème des déserts médicaux, la loi Valletoux, dès son passage dans l'hémicycle, avait provoqué l'ire de l'ensemble de la profession. Cette proposition du député Horizon, Frédéric Valletoux, a été perçue comme « un texte de bureaucrates » qui instaure des contraintes « à tous les articles », pour reprendre les mots de Patrick Gasser, président du syndicat spécialisé, Avenir Spé-Le Bloc. L'une des dispositions les plus controversées de cette loi prévoit d'instaurer une obligation de participation aux permanences de soins pendant les week-ends et les nuits pour ces mêmes professionnels. Une mesure qui, d'apparence, semble bonne sur le principe, mais qui semble totalement déconnectée des difficultés et du poids qu'elle représente pour les médecins libéraux. En effet, comme le souligne Théophile Denis, représentant de l'intersyndicale : « Les gardes de nuit des internes sont payées 11,52 euros de l'heure, alors qu'il s'agit d'un travail épuisant, exigeant et indispensable à notre système de santé ». Une autre mesure fait consensus dans l'opposition de l'intersyndicale à la loi Valletoux : elle empêche les professionnels de santé de signer un contrat d'intérim dans le cas où ils n'auraient jamais exercé dans un établissement de santé.

Combien de temps durera la grève ? Nous n'en savons rien, néanmoins, il semble bien que les médecins libéraux aient l'avantage : 70 et 80 % des cabinets de médecins libéraux pourraient fermer leurs portes dès ce vendredi 13, selon les estimations de l'intersyndicale. La pression est à son paroxysme sur le Sénat, qui est actuellement en deuxième lecture de la loi Valletoux, ainsi que sur le gouvernement. La grève, étant déclarée « illimitée », elle risque de pousser les services publics au bord de l'implosion, surtout considérant qu'ils seront, avec les pharmacies, les seuls établissements à rester ouverts.

Axelle Ker

Diplômée en sciences politiques et relations internationales, journaliste chez Économie Matin & Politique Matin.

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