Au cœur d’une Asie centrale redessinée par des forces géopolitiques croisées, le Kazakhstan émerge comme une plaque tournante de la diplomatie. À la croisée des ambitions européennes, turques, russes et chinoises, ce pays cristallise de nouvelles alliances et suscite un intérêt croissant.
Europe, Turquie, Chine, Russie… : plus que jamais, le Kazakhstan endosse le rôle de plateforme diplomatique centrale
Union économique eurasiatique, Organisation de coopération de Shanghai, l’Organisation des États turciques… : le Kazakhstan souhaite être présent sur un maximum de forums internationaux
Le Kazakhstan occupe une position géographique et stratégique unique qui le place naturellement au centre des interactions entre quatre pôles majeurs : l’Europe, la Turquie, la Chine et la Russie. Véritable nœud des routes commerciales, énergétiques et culturelles, ce vaste territoire, riche en ressources naturelles, sert de corridor entre l’Est et l’Ouest. Au cours des deux dernières décennies, l’ouverture internationale du pays a permis de multiplier les rencontres diplomatiques, favorisé les projets d’infrastructures et consolidé son rôle dans de multiples institutions régionales, telles que l’Union économique eurasiatique, l’Organisation des États turciques ou l’Organisation de coopération de Shanghai. Les gouvernements successifs, cherchant à affirmer l’indépendance et la stabilité nationale, ont misé sur une politique extérieure multivectorielle pour maintenir un équilibre entre les grandes puissances.
Le Kazakhstan intéresse l’Europe pour ses ressources énergétiques et en tant qu’« espace tampon »
L’Europe voit dans le Kazakhstan un partenaire potentiellement clé, tant pour la diversification de ses approvisionnements en ressources énergétiques que pour la stabilisation d’un espace tampon, à l’écart des tensions directes entre Moscou et Bruxelles. Tandis que le Vieux Continent s’efforce de réduire sa dépendance aux hydrocarbures russes, le Kazakhstan offre une alternative crédible grâce à des réserves substantiellement riches en pétrole, en gaz et en minerais stratégiques. C’est également un point de passage indispensable des corridors de transport transcontinentaux, reliant le marché européen aux dynamiques industrielles et commerciales d’Asie. Les autorités kazakhes, conscientes du potentiel que recèle ce rôle de relais, investissent dans des infrastructures ferroviaires et routières permettant de fluidifier les échanges. Ainsi, la récente multiplication des rencontres diplomatiques de haut niveau entre Astana, Bruxelles et des capitales européennes témoigne de la volonté mutuelle de consolider des liens économiques et politiques durables.
Le Kazakhstan, un membre à part entière du « monde turc »
Pour la Turquie, la proximité linguistique, culturelle et historique avec le Kazakhstan fait de ce partenaire d’Asie centrale un maillon crucial dans la réalisation d’un vaste projet d’influence régionale. Ankara, cherchant à asseoir son rôle de puissance intermédiaire, voit dans le Kazakhstan un allié idéal pour renforcer son ancrage sur le continent. Les initiatives communes se multiplient, tant sur le plan économique, avec des investissements dans les secteurs du transport, de la construction, de l’agroalimentaire ou des télécommunications, que sur le plan diplomatique, où le Kazakhstan participe à l’élaboration de dialogues régionaux portés par la Turquie. De plus, l’essor du « Corridor transcaspien » passant par l’Asie centrale, soutenu par Ankara, permet d’ouvrir de nouvelles liaisons entre l’Europe et la Chine, consolidant le rôle kazakh comme plateforme de transit.
Articuler les intérêts russes et chinois sans laisser émerger de confrontations directes
La Russie et la Chine, pour leur part, perçoivent le Kazakhstan comme une composante clef de leurs visions stratégiques respectives. Moscou, longtemps acteur dominant de la région, cherche à maintenir son influence au sein de son « étranger proche », tout en composant avec les ambitions grandissantes de Pékin. Le Kazakhstan, situé au cœur de l’initiative chinoise des « Nouvelles routes de la soie », représente un pivot terrestre essentiel du gigantesque projet d’infrastructures de Xi Jinping. La stabilité politique du pays, sa diplomatie discrète mais efficace et sa volonté de demeurer un interlocuteur fiable permettent d’articuler les intérêts russes et chinois sans laisser émerger de confrontations directes. Ainsi, le Kazakhstan prend la forme d’un espace de médiation potentiel, offrant un terrain neutre où Moscou et Pékin peuvent ajuster leurs stratégies, tout en s’adaptant aux ajustements et aspirations de l’Europe et de la Turquie dans ce nouvel échiquier mondial.