L’art de se faire entendre : Les secrets de Fanny Destenay

Pourquoi avez-vous ressenti le besoin d’écrire un guide spécifiquement dédié à la communication pour les élus ?

Au cours de conversations avec d’un côté des électeurs et de l’autre des élus, j’avais remarqué que le lien de communication était rompu. Les élus ne comprenaient pas que les électeurs ne soient pas au courant de leurs actions et les électeurs avaient l’impression que la politique ne faisait rien pour eux, alors même que de nouvelles lois passaient, des lois en leur faveur. Par manque d’informations, ils ne faisaient pas appel à ces lois.

Quelle est, selon vous, la plus grande erreur de communication que commettent les élus aujourd’hui ?

À mes yeux, une partie des élus font trop confiance aux électeurs pour aller chercher l’information. Parce que la politique est au centre de leur vie, ils pensent que les électeurs vont d’eux-mêmes se renseigner. C’est faux. Les élus doivent pousser l’information auprès de leurs administrés, s’assurer que l’information est bien passée auprès de tous. Si ce n’est pas le cas, ils doivent chercher un autre canal de communication jusqu’à trouver la meilleure méthode selon leur situation. À aucun moment, un élu ne doit se dire qu’il a fait sa part du chemin et que l’administré doit faire la sienne. L’élu est responsable de sa communication de A à Z.

Dans votre livre, vous évoquez l’importance de "se faire connaître, se faire aimer, et faire agir". Est-ce possible d’exceller dans ces trois étapes ?

Je crois que les élus qui ont une bonne communication ont excellé dans les trois étapes en effet. L’exemple parfait est celui du parcours du Front National, puis Rassemblement national avec à sa tête l’image de Marine Le Pen. La stratégie a tellement fonctionné que malgré ses déboires judiciaires actuels, son image n’est que très peu entachée. La phase « se faire aimer » a été longue et fastidieuse. Aujourd’hui son image est si bien enracinée dans l’esprit de ses électeurs que même un procès pour détournement de fonds de 6,8 millions d’euros ne peut plus changer l’avis qu’ils ont sur elle.

Comment les réseaux sociaux ont-ils redéfini la manière dont les élus doivent communiquer ?

Les réseaux sociaux sont un formidable atout pour parler au plus grand nombre sans passer par les médias traditionnels. Grâce aux réseaux sociaux, chaque élu est maitre de son propre média et peut décider du rythme, du thème et de la forme de sa communication. En revanche, avant d’être des élus, les politiques sont des humains susceptibles de vivre les mêmes dérives et addictions que le reste de la population, je pense en particulier à l’addiction à la sérotonine à la vue d’un succès numérique. Les élus doivent être vigilants concernant leur propre comportement sur les réseaux sociaux afin de ne pas abîmer leur image par un besoin trop important de victoires immédiates (via un grand nombre de likes sur une publication) au détriment de vraies victoires qui pourraient aider la population, mais qui, elles, ne sont pas immédiatement récompensées par des démonstrations de validation par leurs administrés.

Quel conseil donneriez-vous à un élu qui commence tout juste à construire sa stratégie de communication ?

Je lui conseillerai de se poser et de réfléchir avant de démarrer bille en tête. C’est une chance d’avoir une image complète à construire quand on est un élu. De démarrer d’une page blanche ou presque. Je lui dirai de penser global. De voir où il veut arriver et quand ; puis de découper les étapes qui lui permettront d’arriver à ce point. Comme dans tout projet, on ne fonce pas tête baissée. Alors attention aux idées de génie qui ne seraient pas incluses dans une stratégie globale. L’élu doit être sûr de l’objectif de son action, de sa cible et des répercussions possibles de cette action.