Hongrie : un milliard d’euros envolé, la crise avec l’UE s’aggrave

Le différend entre Bruxelles et Budapest a franchi un cap. En pleine crise économique, la Hongrie vient de perdre une partie substantielle des fonds européens.

Adelaide Motte
Par Adélaïde Motte Publié le 2 janvier 2025 à 15h11
Hongrie

Le 1er janvier 2025, l'Union européenne a acté la suppression définitive d’un milliard d’euros de subventions européennes à la Hongrie, un acte inédit et lourd de conséquences pour le gouvernement du Premier ministre Viktor Orbán. Cette décision découle de désaccords profonds.

Pourquoi la Hongrie perd-t-elle ces fonds européens ?

Depuis 2020, l’Union européenne a renforcé son mécanisme de conditionnalité, liant l’octroi de fonds européens au respect des principes de l’État de droit. Or, la Hongrie est accusée de graves défaillances en matière de transparence dans la gestion des marchés publics, de corruption et de contrôle insuffisant des finances publiques. Bruxelles a notamment relevé que 30 % des appels d’offres publics hongrois présentaient des irrégularités, un taux supérieur à la moyenne européenne.

Le blocage a commencé en 2022, quand l’Union européenne a gelé 19 milliards d’euros, dont une partie conditionnée à la mise en œuvre de réformes significatives. Faute de mesures suffisantes, une tranche de 1,04 milliard d’euros a expiré, une décision jugée irréversible par la Commission européenne.

La Hongrie dénonce une sanction politique

Viktor Orbán a dénoncé cette sanction comme une manœuvre politique, accusant Bruxelles de vouloir "punir" la Hongrie pour ses positions conservatrices et souverainistes. Lors d’une conférence de presse en décembre 2024, il a déclaré : « Ils essaient de voler l’argent des Hongrois sous prétexte de démocratie. »

La Hongrie avait promis des réformes sur le contrôle des fonds publics, mais celles-ci sont jugées insuffisantes par l’Union européenne. La Hongrie continue donc à lutter sur les fronts financiers, allant jusqu’à menacer de bloquer des décisions budgétaires européennes.

Conservateur contre progressiste : la bataille de la Hongrie contre l'Union européenne

Les dissensions entre l'Union européenne et la Hongrie sont loin de ne concerner que la corruption. Fin mai 2024, la Hongrie faisait partie des neufs Etats-membres ayant refusé de signer la déclaration européenne des droits LGBT. La Hongrie accuse régulièrement l'Union européenne de diffuser une propagande progressiste.

A l'inverse, Viktor Orbán s'attache à défendre certaines valeurs conservatrices. Il a notamment interdit les événements propices à la diffusion de la culture LGBT dans les écoles. Il a également fait inscrire dans la Constitution que dans une famille, le père était un homme et la mère une femme.

La Hongrie en lutte contre l'immigration

La Hongrie ne partage pas non plus la vision de l'Union européenne concernant l'immigration. Elle avait ainsi mis en place des restrictions aux frontières, rendues caduques par l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie dans l'espace Schengen.

Les fonds européens, un atout pour la Hongrie

Les subventions européennes représentent une bouée de sauvetage pour l’économie hongroise, notamment dans les secteurs de l’agriculture, des infrastructures et de l’éducation. Selon les données de la Banque nationale hongroise, les fonds de l’UE ont contribué à hauteur de 3 % du PIB annuel du pays.

Catégories de financementMontant annuel moyen (en millions d’euros)
Développement régional1 200
Agriculture et ruralité800
Recherche et innovation400

La perte de ces financements, ajoutée à une récession économique de -1,5 % en 2024, accentue la vulnérabilité budgétaire du pays. Les conséquences risquent de se faire sentir sur les grands projets publics et sur l’emploi.

Une situation inédite en Europe

C’est la première fois que l’UE applique de manière aussi stricte son mécanisme de conditionnalité. Ce précédent pourrait avoir des répercussions sur d’autres États membres, comme la Pologne, également sous le radar de Bruxelles.

En Hongrie, la crise politique s’accentue. L’opposition menée par Péter Magyar appelle à des élections anticipées, affirmant que la gestion autoritaire de Viktor Orbán isole le pays sur la scène européenne. « Il est temps de mettre fin à ce règne solitaire qui appauvrit notre nation », a déclaré le leader du parti Momentum.

Adelaide Motte

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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