Ecole : la violence mérite-elle les fouilles d’Elisabeth Borne ?

Face à l’augmentation des violences en milieu scolaire et la prolifération des armes blanches parmi les élèves, Élisabeth Borne a annoncé la mise en place de fouilles inopinées des sacs à l’entrée des établissements.

Jade Blachier
Par Jade Blachier Publié le 21 février 2025 à 12h13
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Le 21 février 2025, la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, a annoncé une nouvelle mesure sécuritaire pour lutter contre la violence à l'école : l’organisation de fouilles aléatoires des sacs des élèves dès le printemps. Ces fouilles, qui seront réalisées par les forces de l’ordre en collaboration avec les préfets et les procureurs, visent à endiguer la circulation d’armes blanches et autres objets dangereux dans les établissements.

Une école sous haute surveillance : une réponse aux violences ?

La violence scolaire a franchi un seuil inquiétant ces dernières années. Les agressions entre élèves, les attaques contre les enseignants et la multiplication des armes blanches dans les établissements ont conduit à des drames. Face à ce constat alarmant, le gouvernement a choisi une réponse sécuritaire.

Selon Élisabeth Borne, les établissements scolaires sont confrontés à une montée en puissance de la violence, notamment par l’usage accru d’armes blanches chez les jeunes. La ministre justifie donc la mise en place de ces fouilles comme un moyen d’assurer la sécurité des élèves et des personnels éducatifs.

Les fouilles inopinées : une solution ou un écran de fumée ?

Ce ne sont pas les enseignants ni le personnel éducatif qui procéderont à ces fouilles, mais bien les forces de l’ordre. Élisabeth Borne a précisé que cette tâche ne relevait pas des prérogatives du personnel de l’Éducation nationale. La mise en œuvre des fouilles se fera sous l’autorité des préfets et des procureurs, et concernera les établissements jugés à risque.

Le droit français impose un cadre strict aux fouilles. Selon l’article 78-2 du Code de procédure pénale, les contrôles de police ne peuvent être effectués qu’avec un motif légitime et sous autorité judiciaire. Or, dans le cas de ces fouilles scolaires, le cadre exact n’a pas encore été précisé. Élisabeth Borne a toutefois annoncé son intention de modifier le Code de l’éducation pour que tout élève trouvé en possession d’une arme blanche soit automatiquement traduit devant un conseil de discipline et fasse l’objet d’un signalement obligatoire au procureur. Jusqu’à présent, cette décision relevait de l’appréciation du chef d’établissement.

Une politique répressive, mais sans prévention ?

La mise en place de fouilles inopinées s’inscrit dans un contexte plus large de sécurisation des établissements scolaires. En mars 2024, la ministre de l’Éducation de l’époque, Nicole Belloubet, avait déjà annoncé la création d’une force de sécurité mobile scolaire, composée d’agents spécialisés capables d’intervenir en cas de crise majeure.

Si ces mesures témoignent d’une volonté gouvernementale de protéger élèves et enseignants, elles ne s’attaquent pas aux causes profondes de la violence en milieu scolaire. La prévention reste le grand absent de ce plan sécuritaire. Pourquoi les armes blanches circulent-elles si facilement parmi les jeunes ? Quelles sont les racines de la montée de la violence scolaire ?

De nombreux experts en éducation insistent sur l’importance de programmes éducatifs solides, d’une présence accrue de psychologues scolaires et d’un renforcement des équipes pédagogiques pour identifier et encadrer les élèves en difficulté.

Un climat d’insécurité grandissant pour les enseignants

Depuis quelques années, le personnel éducatif est confronté à une montée inquiétante de l’insécurité dans les établissements scolaires. Les attaques contre les enseignants ne sont plus des faits isolés et témoignent d’une radicalisation de la violence en milieu scolaire. En 2020, Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie, a été assassiné à Conflans-Sainte-Honorine après avoir fait l’objet d’une campagne de haine sur les réseaux sociaux et reçu des menaces de mort. Trois ans plus tard, en octobre 2023, Dominique Bernard, professeur de lettres à Arras, a été tué dans des circonstances similaires. Ces drames ont profondément marqué la communauté éducative et mis en lumière le danger croissant auquel sont exposés les enseignants.

Au-delà de ces actes tragiques, les menaces de mort et les agressions verbales ou physiques sont devenues monnaie courante dans de nombreux établissements. Certains enseignants se retrouvent ciblés après avoir abordé des sujets sensibles en classe, d’autres sont victimes de harcèlement sur les réseaux sociaux, encouragé parfois par des élèves eux-mêmes ou par leur entourage.

La pression constante et le climat de peur qui en résultent affectent profondément la mission éducative, poussant certains professeurs à l’autocensure, voire à quitter leur poste. Le ministère de l’Éducation a reconnu cette situation alarmante et annoncé des mesures de soutien aux enseignants, mais celles-ci restent insuffisantes pour enrayer cette spirale de violence. La mise en place des fouilles inopinées des sacs s’inscrit dans ce contexte tendu, où l’urgence sécuritaire semble primer sur une réflexion de fond sur les causes profondes de cette montée de l’insécurité.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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