L'effondrement inédit de la participation des Français aux élections régionales (et départementales) devrait plus qu'inquiéter les hommes politiques en général, et l'exécutif en place en particulier. Il ne faut pas se leurer : l'abstention de 7 Français sur 10 est désormais un mode d'expression, au même titre que le mouvement des Gilets Jaunes en 2018/2019. Mouvement dont la saison 2 est d'ores et déjà annoncée et programmée...
Il suffit pour s'en convaincre de consulter les statistiques de ventes de voitures sur les 12 derniers mois. Deux voitures sur dix achetées l'an dernier par les Français étaient électriques ou hybrides. Un chiffre qui devrait atteindre ou dépasser les 30% en cours d'année 2021. Mais devinez un peu qui achète ces voitures ? Pas les habitants de la France périphérique, celle-là même qui est descendue occuper les ronds-points fin 2018 et a tenu par endroits pendant des mois avant de renoncer à tenter de se faire entendre, par lassitude. Poussée à bout par une écotaxe sur le carburant qui renchérissait le prix du plein de quelques euros à chaque fois. Un non-sujet pour les bobos parisiens qui n'ont de toute manière pas de voiture (et galérent pour en louer cet été...). Une pécadille pour ceux qui roulent en hybrides, tellement moins gourmandes que les voitures construites entre 1990 et 2010. Mais une somme pour qui compte ses sous à partir du 15... ou du 5 du mois.
La France périphérique n'achète pas de voitures neuves, mais d'occasion. Il se vend une voiture neuve, pour près de trois voitures de première, seconde, troisième main en France. Conséquence évidente, le parc vieillit lentement mais sûrement.
Quand on regarde les statistiques des réseaux de concessionnaires, on constate facilement que les ventes de voitures "dites" vertes sont bien évidemment concentrées dans les grandes métropoles, celles-là même qui vont se doter de ZFE (zones à faibles émissions) ou en sont déjà équipées, comme le Grand Paris ou le Grand Lyon. Des zones dans lesquelles... les voitures âgées parfois de moins de dix ans seront interdites l'an prochain (Crit'air 3), et encore plus récentes (Crit'air 2) en 2023.
Quel lien avec les régionales et l'abstention ?
Il est pourtant simple. Le mouvement des Gilets Jaunes, qui a poussé dans la rue et sur les ronds-points à son paroxisme plus d'un million de manifestants, était la manifestation d'une nouvelle forme d'expression populaire. Faute d'Assemblée nationale réellement représentative (les voix de 20 millions d'électeurs y sont incarnées par deux poignées de députés), ces dizaines de millions de français (en comptant leurs soutiens dans l'opinion) agitaient le drapeau rouge sous les yeux du pouvoir exécutif. Écoutez-nous. Ne nous oubliez pas.
Gilets Jaunes : deux ans, une pandémie et trois confinements plus tard, rien n'a changé
Deux ans, une pandémie et trois confinements plus tard, rien n'a changé.
Ou plutôt si : comme si de rien n'était, on accélère le déploiement d'éoliennes un peu partout sur le territoire et en mer, avec le soutien inconditionnel des maires verts des grandes villes et de leurs électeurs... Qui ne verront pas une éolienne pointer le bout de sa pale à moins de 40 kilomètres de chez eux au bas mot. Et tant pis pour les millions de tonnes de béton enfoui qu'ellles représentent. Et tant pis si leur rendement réel est à des années lumière de leur rendement promis. Et tant pis si l'intermittence de leur fonctionnement oblige à prévoir en parallèle des centrales au gaz ou à charbon, prête à les suppléeer au pied levé au moment des pics de consommation.
Comme si de rien n'était, l'Assemblée nationale non représentative vote tranquillement le principe des ZFE (zones à faibles émissions), que plusieurs grandes métropoles s'apprêtent à mettre en place dès cette année ou l'an prochain. Zones dans lesquelles des voitures construites en 2011, c'est-à-dire il y a seulement dix ans, seront bannies demain ! En terme d'obsolescence programmée, on ne fait pas mieux. L'association 40 millions d'automobilistes a calculé que pas moins de 17 millions d'automobilistes seront concernées dans les trois prochaines années par les mesures de restriction de circulation, un peu partout en France. Autrement dit, 7 Français sur 10, ceux qui roulent avec des voitures achetées d'occasion et n'ont pas les moyens de s'offrir pour 200, 300, 400, 500 euros par mois en LLD (location longue durée) une belle voiture toute moderne, seront tricards chez eux. Interdits de circulation.
Comme si de rien n'était, le prix des carburants est reparti à la hausse (+30% en un an), signe de la reprise de l'économie mondiale, et la promesse d'une TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers) flottante, capable de modérer la hausse des prix des carburants, est tombée dans les oubliettes.
Reprenons l'équation : Hausse des prix des carburants + interdiction de circuler pour des millions de voitures + installation d'éoliennes "à la campagne" et en mer, là où les bobos écolos ne vivent pas, mais viennent se "ressourcer" quelques semaines par an = situation totalement explosive.
L'absention massive doit inquiéter : la démocratie est en danger
Quand vous n'allez plus voter, alors que deux bulletins de vote au bas mot, celui de La France Insoumise, et du Rassemblement National, servaient jusqu'ici à canaliser le mécontentement de millions de Français, c'est très, très mauvais signe. Certains commentateurs se réjouissent du repli d'un bon tiers du Rassemblement National, passant de 28% des suffrages exprimés en 2015, à 19% en 2021. Comme LFI a été fondé en 2016, et a connu son apogée lors de la présidentielle de 2017, forcément, il est impossible de comparer les deux scores, mais l'on connaît aujourd'hui la porosité entre les électorats du FN devenu RN, et de LFI.
Quand vous n'allez plus voter, c'est que vous ne croyez plus que la démocratie vous permette de décider de votre destin et d'exprimer vos idées. Un ministre de l'Intérieur n'a-t-il pas parlé de "marque satanique", en évoquant une possible victoire du RN ? Quand vous dites aux électeurs d'un parti politique légal qu'ils sont des suppots de Satan, il ne faut pas s'étonner ensuite qu'ils boudent les urnes. Et craquent une allumette à la première occasion pour allumer des bûchers. Et à ce jeu-là, une fois n'est pas coutume, bon nombre d'hommes politiques, aux affaires ou non, ont joué aux pompiers pyromanes.
Demeure une question : à quand, la saison 2 des Gilets Jaunes ? La réponse est assez simple. Quand l'argent magique cessera de maintenir artificiellement la tête hors de l'eau de ceux qui ont tout perdu avec la pandémie. Leur boutique, leur restaurant, leur emploi, leurs petits revenus complémentaires déclarés ou non, ou leurs revenus principaux 100% au black mais sur lesquels tout le monde ferme les yeux, le maire comme les gendarmes. Un gars qui se débrouille pour vivre ou faire vivre sa famille sans rien demander à personne, en oubliant l'URSSAF et la TVA, c'est un RSA et un logement social à financer ou à trouver en moins.