Débat Attal-Bardella : que peut-on en attendre ?

Le débat entre Gabriel Attal et Jordan Bardella, prévu pour le jeudi 23 mai sur France 2, suscite de nombreuses réactions médiatiques. Organisé à l’initiative du Président Emmanuel Macron, ce débat entre un Premier ministre et la tête de liste du RN aux élections européennes semble atypique.

Adelaide Motte
Par Adélaïde Motte Modifié le 23 mai 2024 à 16h09
bardella

Que peuvent tirer Attal et Bardella de ce débat ?

Le débat se déroulera sur France 2, le jeudi 23 mai à 20h15. Il s'inscrit dans le cadre de la campagne pour les élections européennes de juin 2024, et Renaissance le considère comme un moment-clé, destiné à montrer le vrai visage du Rassemblement National, qui caracole en tête des sondages depuis le début de la campagne. Le Président Emmanuel Macron a personnellement demandé à Gabriel Attal de participer à ce débat, ce qui ne lasse pas d'intriguer. Pourquoi ne pas avoir plutôt placé Valérie Hayer, tête de liste de Renaissance et donc alter ego de Jordan Bardella, à cet exercice ?

Jordan Bardella, bien que favori dans les sondages, a beaucoup à gagner de cette confrontation. En effet, être placé sur un pied d'égalité avec le Premier ministre valorise sa position et renforce sa visibilité auprès des électeurs. D'autant que Marine Le Pen ne cache pas son objectif de le placer à Matignon si elle devenait présidente de la République en 2027.

De son côté, Gabriel Attal espère défendre le programme de la majorité, largement décrié par les Français, tout en cherchant à affaiblir son adversaire politique. Ce débat est également vu comme une tentative de maintenir le clivage entre les « populistes » et les « progressistes », un axe stratégique déjà utilisé par Emmanuel Macron lors des précédentes élections européennes en 2019. Lors des élections présidentielles de 2022, le duel entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron avait déjà été annoncé très tôt par les médias, ce qui avait permis à Emmanuel Macron d'appeler au barrage à l'extrême-droite au second tour. Une stratégie qui, cette fois ne fonctionne pas. Le scrutin des élections européennes se déroule en un tour, avec une répartition des sièges proportionnelle à la répartition des voix. 

En-dehors des médias et de Renaissance, qui attend ce débat ?

Les réactions à l'annonce de ce débat sont mitigées. Certains observateurs politiques y voient une manœuvre habile pour renforcer la polarisation politique en France, tandis que d'autres critiquent ce choix, y voyant un « cadeau » fait au RN. En effet, cette confrontation exclut les autres candidats, des Verts aux Républicains, de la scène médiatique, ce qui pourrait favoriser la montée du RN, vu comme seul parti d'opposition sérieux, puisque seul à pouvoir débattre face aux dirigeants. De plus, certains estiment que l'on ne doit pas débattre avec l'extrême-droite.

De plus, il est inhabituel d'organiser un débat entre un Premier ministre et une tête de liste pour les européennes, plutôt qu'entre deux têtes de liste. Cette décision est perçue par certains comme un désaveu de Valérie Hayer, la tête de liste de Renaissance, suggérant que la majorité n'a pas confiance en ses capacités face à Jordan Bardella. En effet, la candidate peine à dépasser les 20% d'intentions de vote. Un mois plus tôt, elle ne réunissait même que 7% des votes des 18-64 ans, son électorat étant principalement constitué des 65 ans et plus.

Bardella peut-il descendre dans les sondages ?

La stratégie de la majorité semble claire : affronter directement le RN pour tenter de le faire descendre dans les sondages. Cependant, cette approche comporte des risques. Les électeurs du RN sont souvent fidèles à ce parti depuis des années, ou tout simplement opposés à Emmanuel Macron, et ne sont pas nécessairement influencés par les performances de leur candidat lors des débats télévisés.

Cette stratégie de polarisation pourrait donc s'avérer peu efficace, en n'affectant que très peu la position de Jordan Bardella, dont les électeurs ne regardent pas les débats télévisés, et en marginalisant les autres partis politiques. Les autres partis de droite, comme Les Républicains et Reconquête! continueront à faire grise mine dans les sondages, et la gauche se déchirera pour savoir qui, des Insoumis ou des socialistes, remportera la plus grosse part du gâteau. Il reste à voir si ce débat parviendra à remobiliser l'électorat macroniste ou s'il contribuera à renforcer la dynamique favorable au RN.

Adelaide Motte

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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