Face à une situation budgétaire exceptionnelle et à la censure historique du gouvernement de Michel Barnier, Emmanuel Macron a annoncé, dans son allocution du 5 décembre 2024, le dépôt imminent d’une loi spéciale.
Emmanuel Macron annonce une loi spéciale pour sécuriser 2025
La loi spéciale, prévue pour mi-décembre, vise à pallier l'absence de budget pour 2025, en maintenant le fonctionnement des services publics et en permettant une transition budgétaire.
Qu'est-ce que la loi spéciale annoncée par Emmanuel Macron ?
La loi spéciale, annoncée comme une « priorité » par Emmanuel Macron lors de son discours, est prévue par l'article 47 de la Constitution et la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) de 2001. Elle permet à l'État de percevoir les impôts et de garantir la continuité des services publics en l'absence d'un budget adopté.
Anne-Charlène Bezzina, constitutionnaliste, la qualifie de « pont entre le budget non adopté et le budget qui sera adopté en 2025 ». Ce dispositif permet au gouvernement de fonctionner sur la base des crédits de l'année précédente, avec des décrets exécutifs pour maintenir les dépenses publiques essentielles. Cependant, il s'agit d'une solution transitoire et apolitique, sans possibilité d'introduire de nouvelles mesures fiscales.
Les implications de la loi spéciale
La loi spéciale autorise le gouvernement à percevoir les impôts sur la base de la dernière loi de finances adoptée, garantissant ainsi le paiement des fonctionnaires, les allocations sociales et le financement des infrastructures critiques. Le caractère exceptionnel de cette loi impose des limites strictes. Selon le ministère du Budget, elle ne permet pas d'introduire de nouvelles mesures fiscales, ce qui pourrait susciter un débat constitutionnel si des ajustements, tels que la modification du barème de l'impôt sur le revenu, étaient envisagés.
Bien qu'elle assure la continuité, cette loi ne règle pas les tensions sous-jacentes. Le recours à une telle mesure traduit une impasse politique majeure. La gauche et le Rassemblement national, principaux artisans de la censure du gouvernement, critiquent une gestion jugée « improvisée ». Alors que la motion de censure affole les marchés financiers, la loi spéciale doit permettre de conserver un semblant de stabilité.
LFI s'inquiète des répercussions sociales
Éric Coquerel, président de la Commission des finances à l’Assemblée nationale et député La France Insoumise, a dénoncé une tentative du gouvernement de contourner le Parlement en privant les élus d’un débat démocratique approfondi. Selon lui, « cette loi spéciale est une façon d’imposer un budget sans discussion, ce qui montre une fuite en avant autoritaire ».
Le groupe LFI s’inquiète également des implications sociales d’un budget provisoire basé sur celui de 2024. « Les besoins pour 2025 ne sont pas les mêmes, notamment face à l’urgence écologique et sociale. Reconduire les choix budgétaires de l’année précédente, c’est acter un immobilisme dangereux », a affirmé Mathilde Panot, présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale.
Le Rassemblement National dénonce une manoeuvre désespérée d'Emmanuel Macron
Le Rassemblement National, par la voix de Marine Le Pen, a dénoncé une loi qu’elle qualifie de « masque pour dissimuler l’échec gouvernemental ». Elle a déclaré : « Macron est obligé de recourir à des artifices législatifs parce qu’il ne sait plus gouverner avec les Français. Cette loi spéciale est une manœuvre désespérée. »
Cependant, le RN adopte insiste sur la nécessité de maintenir les institutions et de préserver le fonctionnement des services publics. Marine Le Pen a ajouté : « Nous examinerons ce texte, car il est essentiel que les Français ne paient pas le prix de l’incompétence gouvernementale. »
Le camp présidentiel se veut rassurant
Bien que démissionnaire, le gouvernement de Michel Barnier, qui gère les affaires courantes, a également défendu cette initiative. Dans un communiqué, Michel Barnier a rappelé que la loi spéciale « n’est pas une solution idéale, mais elle est indispensable pour éviter un blocage complet de l’État ». Il a ajouté que le rôle du gouvernement était avant tout « technique et apolitique dans cette phase de transition ».
Le ministre du Budget intérimaire a précisé que les décrets liés à la loi spéciale ne viseront qu'à reconduire les crédits nécessaires, sans introduire de nouvelles mesures fiscales : « Nous appliquerons strictement les règles prévues par la loi organique relative aux lois de finances. Cette loi spéciale est un outil pour maintenir le fonctionnement normal de l’État, rien de plus. »