Guerre commerciale : la Chine défie Trump devant l’OMC

Face à l’offensive protectionniste de la politique de Donald Trump, la Chine a officiellement porté plainte devant l’OMC.

Jade Blachier
Par Jade Blachier Publié le 19 février 2025 à 10h02
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Le 19 février 2025, la Chine a officiellement déposé une plainte auprès de l’OMC contre les nouvelles hausses de droits de douane imposées par Donald Trump. Depuis son retour à la Maison-Blanche, le président américain n’a pas perdu de temps pour relancer la guerre commerciale qu’il avait entamée dès son premier mandat. En frappant les importations chinoises d’une surtaxe de 10 %, avec des augmentations allant jusqu’à 25 % sur des secteurs clés comme l’acier et l’aluminium, Trump assume une stratégie de confrontation directe. Pékin dénonce une violation des règles du commerce international et alerte sur les conséquences de ces décisions pour l’économie mondiale. Mais au-delà du duel entre les deux superpuissances, cette guerre commerciale met en lumière un débat plus profond : celui de la souveraineté économique.

L’OMC, un champ de bataille symbolique, mais inefficace contre Donald Trump

La Chine a saisi l’OMC, mais cette institution est-elle encore un levier crédible face aux États-Unis ? Depuis des années, Washington paralyse l’organisation en bloquant la nomination des juges de son organe d’appel. Donald Trump, qui considère l’OMC comme une structure biaisée servant les intérêts chinois, n’a jamais hésité à contourner ses règlements. Lors de son premier mandat, il avait déjà ignoré plusieurs décisions condamnant les surtaxes américaines sur les importations d’acier.

Pékin le sait, mais joue néanmoins la carte diplomatique pour apparaître comme le défenseur d’un système de commerce ouvert. Son objectif est double : montrer au monde que Washington est l’agresseur, tout en tentant de fédérer d’autres partenaires commerciaux contre la politique de Trump. L’Europe, elle-même visée par de nouvelles taxes américaines, pourrait être tentée d’appuyer la Chine.

Le protectionnisme de Donald Trump : une menace pour le commerce, mais une leçon pour les autres nations

Si la politique protectionniste de Trump fait grincer des dents à l’international, il est difficile de nier qu’elle repose sur une logique économique implacable. Depuis des décennies, les États-Unis accusent un déficit commercial colossal, principalement avec la Chine. En taxant massivement les importations, Trump vise un double objectif : rendre les produits chinois plus chers pour les consommateurs américains et inciter les entreprises à relocaliser leur production sur le sol américain.

Cette stratégie, si elle est brutale, s’inscrit dans un contexte où la mondialisation a entraîné des déséquilibres profonds. La désindustrialisation massive des pays occidentaux, la dépendance accrue aux importations asiatiques et l’effondrement de certaines classes moyennes sont autant de symptômes d’un commerce international devenu incontrôlable. Donald Trump, en imposant une logique de « réciprocité » dans les échanges, envoie un signal fort aux autres États : la mondialisation n’est pas une fatalité, et il est possible d’imposer des barrières pour protéger son économie.

Si certains dénoncent le risque d’un retour au protectionnisme des années 1930, d’autres y voient au contraire une opportunité pour redéfinir les règles du commerce international. L’Union européenne, qui critique officiellement la politique de Trump, n’hésite pourtant pas à envisager des mesures similaires, notamment en taxant certaines importations chinoises pour protéger son industrie automobile.

Une guerre qui coûtera cher aux États-Unis comme à la Chine

Si la stratégie de Trump vise à renforcer l’industrie américaine, elle comporte aussi des risques majeurs pour l’économie nationale. En rendant les produits importés plus chers, ces nouvelles taxes risquent d’alimenter l’inflation et de peser sur le pouvoir d’achat des Américains. Plusieurs entreprises, notamment dans le secteur de la construction et de l’automobile, s’inquiètent déjà de la hausse des coûts des matières premières comme l’acier et l’aluminium.

De son côté, la Chine n’est pas non plus en position de force. Pékin a riposté en augmentant les taxes sur certaines importations américaines, notamment le charbon et les équipements agricoles. Mais l’économie chinoise, déjà affaiblie par le ralentissement de sa croissance et la crise de son secteur immobilier, pourrait souffrir davantage que les États-Unis de ce conflit prolongé. Si les exportations chinoises vers les États-Unis diminuent trop fortement, le pays pourrait être contraint de revoir son modèle économique basé sur l’exportation, au risque d’accroître les tensions sociales internes.

Qui a vraiment le plus à perdre ?

Dans cette guerre commerciale, les États-Unis et la Chine jouent un jeu dangereux. Trump mise sur la capacité des entreprises américaines à compenser les pertes à court terme par une relocalisation progressive. La Chine, quant à elle, tente de diversifier ses marchés pour ne plus dépendre des exportations vers les États-Unis. Mais à terme, les conséquences risquent de s’étendre bien au-delà des deux protagonistes.

L’Europe, qui entretient des échanges massifs avec les deux puissances, pourrait être affectée par cette guerre économique. Une baisse de la croissance chinoise ralentirait la demande en produits européens, tandis qu’une hausse des coûts aux États-Unis pourrait impacter certaines entreprises exportatrices du Vieux Continent.

Finalement, cette guerre commerciale est le reflet d’un changement plus profond : la fin de l’illusion du commerce mondialisé sans régulation. Si Trump agit avec brutalité, il met en lumière une réalité qui dérange : aucun pays ne peut survivre sans maîtriser sa production et son commerce extérieur. Combien d’autres nations suivront son exemple, en remettant en cause les dogmes du libre-échange pour rétablir un certain équilibre économique ?

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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