Guerre commerciale : l’UE et la Chine pourraient signer un accord pour leurs voitures électriques

Alors que les tensions commerciales s’intensifient entre les principales puissances économiques mondiales, l’Union européenne et la Chine amorcent une évolution stratégique dans la régulation des échanges automobiles. Une nouvelle approche fondée sur les prix planchers pourrait redessiner l’équilibre du marché européen.

Jade Blachier
Par Jade Blachier Publié le 11 avril 2025 à 10h06
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Le 10 avril 2025, la Commission européenne a confirmé l’ouverture de négociations officielles avec la Chine en vue d’un abandon progressif des droits de douane sur les voitures électriques importées depuis ce pays. Cette décision marque un changement significatif de posture, tant sur le plan commercial que diplomatique, dans un contexte marqué par les tensions sino-américaines et la quête d’autonomie industrielle du Vieux Continent.

De la taxation aux prix planchers : la nouvelle approche européenne

Depuis l’automne 2024, l’Union européenne applique des droits de douane pouvant atteindre 45,3 % sur certains véhicules électriques chinois, à la suite d’une enquête sur les pratiques de subvention étatique considérées comme sources de distorsions de concurrence. Toutefois, cette stratégie semble aujourd’hui laisser place à une formule alternative basée sur l’instauration de prix planchers à l’exportation.

Cette mesure, discutée entre le commissaire européen au Commerce Maros Sefčovič et son homologue chinois Wang Wentao, viserait à maintenir une concurrence équitable sur le marché tout en réduisant le risque d’escalade commerciale. L’objectif affiché est double : éviter une guerre tarifaire prolongée, et préserver la stabilité du marché européen sans recourir à des mesures purement protectionnistes.

Une réponse ciblée à la stratégie industrielle en Chine

Les autorités européennes cherchent à encadrer les effets des politiques industrielles chinoises, perçues comme soutenant massivement la compétitivité de leurs constructeurs grâce à des aides publiques. L’arrivée de véhicules à bas coût, notamment portés par des acteurs comme BYD ou MG (groupe SAIC), sur le marché européen a suscité des inquiétudes sur la capacité de l’industrie locale à faire face à cette pression.

Le système de prix minimums serait conçu comme une mesure proportionnée et temporaire, visant à préserver les équilibres économiques internes sans exclure les opérateurs étrangers du marché. Il permettrait également à Bruxelles de renforcer son arsenal réglementaire tout en maintenant un dialogue ouvert avec Pékin.

Un contexte commercial tendu à l’échelle mondiale

Ce réajustement intervient dans un climat commercial international particulièrement instable. Les États-Unis ont annoncé une hausse spectaculaire de leurs droits de douane sur les produits chinois, avec un taux de 145 % sur certaines catégories, dont les véhicules électriques. Ce durcissement américain alimente les préoccupations européennes quant à un possible afflux de productions chinoises redirigées vers l’UE.

L’économiste Mary-Françoise Renard, interrogée par TF1 Info, évoque une logique de substitution d’exportations vers l’Europe en raison de la fermeture partielle du marché américain. Cette dynamique pourrait accroître la pression concurrentielle sur les producteurs européens, en particulier sur le segment des véhicules électriques, stratégiquement soutenu dans le cadre du Pacte vert européen.

Dialogue entre la Chine et l'Europe : coopération économique sous conditions

Du côté chinois, les autorités ont exprimé leur volonté de poursuivre les négociations, tout en réaffirmant leur opposition à toute mesure discriminatoire. Pékin voit dans ce processus une opportunité de garantir un accès durable au marché européen tout en répondant aux exigences de transparence et d’équité commerciale.

La Commission européenne insiste sur la nécessité de garanties contraignantes, comparables dans leurs effets aux dispositifs douaniers actuels. Selon plusieurs observateurs, le recours aux prix planchers pourrait s’accompagner de mécanismes de suivi, voire de clauses de révision automatique, afin d’éviter des contournements ou une perte d’efficacité du dispositif.

Un équilibre à trouver entre ouverture commerciale et souveraineté industrielle

Le choix d’une solution intermédiaire reflète une volonté de préserver une approche multilatérale des relations commerciales, tout en reconnaissant les besoins de réindustrialisation et de résilience stratégique. Il s’agit également pour l’UE de ne pas apparaître comme alignée automatiquement sur les positions américaines, et de défendre une voie propre en matière de régulation du commerce international.

Les États membres restent cependant attentifs à la mise en œuvre concrète du dispositif, en particulier dans les pays où l’industrie automobile joue un rôle structurant. La France et l’Allemagne ont exprimé la nécessité d’un cadre clair, garantissant que les conditions de concurrence restent équitables sans entraîner de hausses de prix pour les consommateurs européens.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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