L’immigration est devenue une préoccupation majeure pour les citoyens français au cours de ces dernières décennies. Cette question nécessite une approche réfléchie et dépourvue si possible d’idéologie. Toutefois, bien souvent, les déclarations publiques de certains responsables sont déconnectées de la réalité, soit nous sommes dans des logiques d’invasion et de grand remplacement de la part de la droite nationaliste et d’extrême droite, soit, nous sommes dans le déni de réalité et dans une glorification de l’immigration au sein de la gauche radicale qui sous-estime les difficultés d’intégration des personnes étrangères qui arrivent en France.
Pour une immigration pragmatique adaptée aux réalités économiques
En effet, comment intégrer aujourd’hui ces populations et les accompagner dans la maitrise de la langue française, dans le respect de nos lois, et donc dans un désir et une volonté de vivre ensemble. Cette situation est d’autant plus complexe qu’une partie de la population immigrée ne se retrouve plus aujourd’hui dans ce projet commun de société alors que notre pays a connu plusieurs vagues d’immigration depuis plus de deux siècles.
Face à cette question à la fois délicate mais aussi complexe, il est nécessaire pour le centre droit et la droite modérée d’avoir quelques propositions réalistes et pragmatiques pour nos concitoyens à l’heure de la préparation du projet de loi de Gerald Darmanin, le Ministre de l’intérieur.
Tout d’abord, l’immigration zéro, comme le préconisent certains responsables politiques est un leurre, plutôt que de prôner ce type de politique, nous préconisons l'établissement de quotas dans le cadre de la politique d'immigration. Les quotas présentent plusieurs avantages, notamment de gérer l'immigration de manière plus prévisible et contrôlée et d’éviter des flux migratoires massifs et non planifiés. Ils peuvent être ajustés en fonction des besoins économiques du pays et notamment augmenter le quota de travailleurs qualifiés lorsque des compétences spécifiques sont nécessaires dans l'économie, puis le réduire lorsque ces besoins diminuent. Ils mettent en place des systèmes de sélection basés sur les compétences, favorisant l'immigration de personnes qui apportent des compétences et des qualifications spécifiques qui sont bénéfiques pour l'économie et la société française. La mise en place de quotas contribuera à apaiser les inquiétudes de la population concernant l'immigration en montrant que le gouvernement prend des mesures pour réguler et contrôler le processus. Les autorités pourront gérer plus efficacement les demandes d'immigration, notamment sur les métiers en tension et les besoins de main d’œuvre.
La mise en place de quotas d'immigration doit être réalisée en tenant compte des besoins économiques du pays et des principes d’équité. Par conséquent, la conception et la mise en œuvre de quotas d'immigration doivent être transparentes et basées sur des critères objectifs. Cette politique de quotas doit être privilégiée plutôt que la généralisation des travailleurs clandestins sur les métiers en tension (agents d’entretien, conducteurs de véhicules, aides à domicile…). En effet, la régularisation des travailleurs ne doit se faire qu’au cas par cas car elle est susceptible de créer des appels d’air en matière d’immigration et de fortes tensions au sein de la population française opposée à cette mesure.
Par ailleurs, la question de l’Aide Médicale d’Etat est aussi un sujet complexe et controversé, certes, l'AME représente une charge financière importante pour l'État français, car elle propose un accès gratuit aux soins de santé à des étrangers en situation irrégulière, ce qui engendre des coûts de plus d’1,2 milliards d’euros pour le système de santé. Ses détracteurs soutiennent que la suppression de l'AME pourrait dissuader l'immigration irrégulière en rendant l'accès aux soins de santé plus difficile pour les personnes en situation irrégulière. Sa suppression n’est pas recommandée pour des questions d’humanité, de droits de l’homme et de santé publique, toutefois, sa limitation ou une participation financière de l’ordre de 30 euros par an pourrait être étudiée pour un meilleur équilibre entre l'accès aux soins de santé, la gestion de l'immigration et les coûts budgétaires.
Parallèlement, au-delà de l’AME, la question se pose aussi sur l’accès aux allocations sociales (familiales ou logement). Il est légitime de s’interroger sur la mise en place d’un délai de carence d’une durée de 2/3 ans avant de bénéficier de ces prestations sociales. Ce délai ne concernerait que les étrangers qui ne cherchent apparemment pas à travailler. En effet, la règle doit être claire: celui qui vit ici, travaille et paie des cotisations a aussi droit aux prestations de notre système social. L’objectif avec ce dispositif serait d'inciter les étrangers présents en France à s'insérer rapidement sur le marché du travail.
A l’heure de la préparation des élections Européennes, le renforcement de Frontex, l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes est une nécessité. Le budget de Frontex est d’actuellement environ 843 millions d'euros, alors que le budget de l’Union Européenne est de 180 milliards d’euros par an (hors plan Next Generation EU”, pour répondre aux conséquences économiques de la pandémie de Covid-19). Même si ce budget est en augmentation, comment peut-on traiter sérieusement avec moins d’un Milliard d’euros la gestion des frontières extérieures de l'UE si essentielle pour garantir la sécurité et l'intégrité de l'espace Schengen, où les contrôles aux frontières intérieures sont supprimés.
Certes Frontex joue un rôle en aidant à détecter, prévenir et gérer les mouvements de personnes traversant les frontières de manière illégale. Il facilite la coordination entre les États membres de l'UE dans la surveillance des frontières et le partage de renseignements entre les différentes polices nationales. Mais toutes ces actions sont trop faibles, les ressources financières également ainsi que les personnels dédiés à Frontex pour avoir un impact suffisant en matière de lutte contre l’immigration clandestine. Il est nécessaire d’accentuer la présence d’un Frontex des mers pour permettre à la fois de lutter contre le trafic des migrants, mieux sécuriser les frontière de l’Union Européenne, sauver les migrants en danger mais aussi limiter l’arrivée des migrants en Europe. Les 3 opérations de Frontex en Méditerranée Themis (anciennement Triton), qui couvre la Méditerranée centrale, Poséidon, qui couvre la Méditerranée orientale et Indalo, qui couvre la Méditerranée occidentale doivent être dotées de moyens suffisants pour assurer l’ensemble des missions décrites ci-dessus. Ce renforcement de Frontex doit être compatible avec le respect des droits de l'homme et donnera les moyens à l’UE de mieux assurer le contrôle de ses frontières en renforçant, notamment, un corps de garde côtes/garde-frontières Européen et en développant avec l’Afrique une collaboration plus efficace pour le retour des déboutés du droit d’asile.
Enfin, parce ce que nous avons une vision humaniste et lucide de l’Europe et du monde, nous nous engagerons ensemble à mettre en place un Plan « Marshall » de croissance partagée Euro-Africain et à relancer l’Union pour la Méditerranée afin d’empêcher l’importante vague d’immigration prévisible non seulement pour des raisons économiques ou démographiques mais aussi en raison du réchauffement climatique. Face à des vagues d’immigration potentielle importante, il s’agit de financer des activités économiques qui génèreront à terme des nouveaux emplois et de la prospérité économique. Bien évidemment, ces nouveaux emplois seront majoritairement privés, le financement du développement doit se concentrer sur l’amélioration des infrastructures, l’émergence de nouvelles filières économiques, comme la transformation des matières premières, l’agriculture ou le tourisme dans un premier temps et ensuite des activités à plus forte valeur ajoutée. Cela permettra de créer des emplois et de générer des revenus pour la population jeune d’Afrique, et de soutenir un développement économique à la fois plus autonome et plus durable. Les institutions financières de la France et de l’Europe existent, que ce soient l’Agence française de développement ou la Banque Européenne d’Investissement qui pourrait se doter d’une activité Afrique, et elles complèteront l’argent public européen en finançant des activités économiques avec des prêts à taux bonifiés.
On le voit bien, aujourd’hui, l’immigration est un sujet brûlant en France, avec une perception globalement négative sur la réalité de l’intégration. Notre objectif avec ces propositions est de formuler des solutions réalisables rapidement, sans aller jusqu’à la modification de la Constitution et de déroger à la primauté des traités et du droit européen. En effet, cela nécessite un vote à la majorité des 3/5 du Congrès, c’est-à-dire tout le Parlement, difficilement réalisable dans un contexte politique à la fois agité et incertain.