Marine Le Pen pourrait-elle être déclarée inéligible avant même d’avoir pu contester sa condamnation en appel ? À deux ans des présidentielles, le Conseil constitutionnel s’apprête à trancher la question, alors que la décision en appel est dans quelques jours.
Présidentielle 2027 : le Conseil constitutionnel va-t-il sauver Marine Le Pen ?

Une décision du Conseil constitutionnel très attendue
Le 18 mars 2025, les Sages du Conseil constitutionnel se sont saisis d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui pourrait modifier les peines d’inéligibilité. Jusqu’ici, deux visions s’affrontaient :
- Le Conseil constitutionnel, en tant que juge électoral des mandats nationaux, a toujours refusé d’appliquer une inéligibilité avec exécution provisoire.
- Le Conseil d’État, de son côté, valide ce principe pour les mandats locaux depuis 2012.
Cette divergence pose un problème fondamental d’égalité devant la loi. L’examen de la QPC s’appuie sur le cas d’un élu mahorais, Rachadi Saindou, condamné à une peine d’inéligibilité immédiate. Si le Conseil constitutionnel lui donne raison, Marine Le Pen pourrait éviter l’exécution immédiate de toute condamnation prononcée contre elle dans l’affaire des assistants parlementaires européens.
Le parquet de Paris a requis en novembre 2024 à l’encontre de Marine Le Pen cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire, assortis de deux ans de prison ferme aménageables et de 300 000 euros d’amende. Une peine qui, si elle était confirmée le 31 mars, la priverait immédiatement de toute possibilité de se présenter à la présidentielle de 2027, alors que les sondages la donne favorite du scrutin pour l'instant.
En cas d’application de la peine avec exécution provisoire :
- Elle perdrait immédiatement toute possibilité de candidature, même en cas d’appel.
- Elle conserverait son mandat de députée en raison de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
- Le RN devrait lui trouver un successeur (même si Jordan Bardella tient la corde).
Dès l’annonce des réquisitions, l’entourage de Marine Le Pen a dénoncé une manœuvre politique. "Ils ne pensaient pas que l’accusation irait aussi loin", confiait une source proche.
Le verdict attendu avant le jugement définitif de Marine Le Pen
Au-delà du cas Le Pen, l’enjeu juridique est de taille. Peut-on priver un élu de son mandat dès la première instance, sans attendre un jugement définitif ? Une condamnation avec exécution provisoire empêche tout effet suspensif en appel, rendant le verdict irréversible sur le plan politique.
Rachadi Saindou, l’ex-président de la communauté d’agglomération Dembéni-Mamoudzou, a été condamné le 25 juin 2024 à quatre ans d’inéligibilité avec exécution provisoire pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêts.
Me Myriam Gougeon, avocate de Rachadi Saindou, dénonce une "atteinte à l’égalité devant la loi et à la liberté de l’électeur". Selon elle, cette inéligibilité immédiate est une condamnation politique sans retour : même si la justice revient sur la peine en appel ou en cassation, la carrière de l’élu est déjà brisée.
Le Conseil constitutionnel pourrait :
- Suivre sa jurisprudence et invalider l’exécution provisoire pour les mandats nationaux.
- S’aligner sur le Conseil d’État et généraliser cette peine aux parlementaires.
- Trouver un compromis en appliquant une exécution différée.
Les Sages de la rue de Montpensier doivent rendre leur décision autour du 27 ou 28 mars 2025, soit trois jours avant le jugement du tribunal correctionnel de Paris. Leur choix influencera directement le sort de Marine Le Pen.
Si la QPC est validée, elle restera éligible en attendant l’issue de son procès en appel. Si elle est rejetée, et que le tribunal suit les réquisitions du parquet, sa carrière politique pourrait être stoppée net dès le 31 mars 2025.