Aéroport de Marseille : licenciés pour avoir nourri des SDF avec des invendus

À l’aéroport de Marseille-Provence, quatre salariés ont été brutalement licenciés, le 21 mars, pour avoir donné des invendus alimentaires à des SDF (sans domicile fixe). Ces produits, destinés à être jetés, approchaient de leur date limite de consommation. Une initiative pourtant assumée, visible, et selon les protagonistes eux-mêmes, connue de leur hiérarchie. Mais voilà, dans le monde des franchises et des procédures, la solidarité ne fait pas toujours recette.

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Par Stéphanie Haerts Modifié le 15 avril 2025 à 16h43
Aéroport de Marseille : licenciés pour avoir nourri des SDF avec des invendus
Aéroport de Marseille : licenciés pour avoir nourri des SDF avec des invendus - © PolitiqueMatin

SDF et invendus : une bienveillance en zone interdite à l'aéroport de Marseille

Le salarié au cœur de l’affaire, connu sous le pseudonyme de Sabri, travaillait depuis trente ans à l’aéroport Marseille-Provence comme garçon de comptoir pour Starbucks et Prêt-à-Manger, gérés localement par le groupe SSP. Son rituel quotidien : remplir un chariot de sandwichs et de produits à peine périmés, voués à la destruction, et les distribuer à ceux que la société ignore. « Je commençais par les SDF, on les connaît tous. Il y en a qui sont là depuis plus de 20 ans. », explique Sabri dans un entretien publié sur France 3 PACA.

Il poursuit : « Je connais une femme adorable, d'une grande dignité qui ne demande jamais rien, même pas un verre d'eau. Une autre lave son linge ici et puis l'étend. » À Marseille-Provence, ils seraient près de 80 à errer dans les terminaux. Sabri leur offrait un peu de répit, parfois aussi aux femmes de ménage et agents de sécurité : « Elles nettoyaient chez nous en échange de nourriture. » Il n’a jamais tenté de dissimuler ses actions. Selon ses dires : « Tout se passait dans la plus grande transparence, sous les caméras de vidéosurveillance. Ma direction était au courant, le directeur opérationnel de l’aéroport aussi. »

Marseille : les employés licenciés dénoncent un double discours sur les invendus

Fin mars 2025, Sabri et trois de ses collègues reçoivent leur lettre de licenciement pour faute grave. Le motif ? Non-respect des procédures internes sur le traitement des invendus. « Avant la distribution, toute la marchandise était enregistrée par mon supérieur. Je n’aurais pris aucun risque pour ma carrière ni pour mon entreprise  », affirme Sabri à France 3 PACA.

Le choc est d’autant plus violent que certains employés concernés cumulent jusqu’à 30 ans d’ancienneté. Aucun avertissement préalable. « Du jour au lendemain, poussés dans le vide », résume l’un d’eux dans le reportage de TF1 Info. Sabri témoigne encore : « Je ne dors plus, je ne peux plus entrer dans l’aéroport. » Et malgré le choc, il revendique hautement son action : « Je suis fier d’avoir donné à manger. »

Aéroport, invendus et droit du travail : ce que dit la loi sur les dons à des SDF

Face à la tempête médiatique, la direction du groupe SSP avance une ligne claire : aucun salarié n’est autorisé à récupérer des produits alimentaires destinés à la poubelle sans un cadre précis. Dans le courrier de licenciement consulté par France 3 PACA, le DRH affirme : «Aucun salarié n’a le droit de partir avec de la marchandise destinée à être jetée. Celle-ci doit être jetée dans les containers à poubelle prévus à cet effet sauf décision contractuelle dans les accords des franchises. Toutes les pertes doivent être typées en caisse sur le logiciel des stocks le jour-même où elles ont eu lieu. »

Même ton du côté d’un expert cité par TF1 Info : « Un salarié ne peut pas, à son nom propre, donner des produits qui appartiennent à un employeur. Trop de risques juridiques, trop de risques sanitaires. » L’employeur s’appuie sur le Code du travail et la réglementation sanitaire pour légitimer ses décisions. Dans un communiqué cité par TF1 Info, il explique vouloir « mettre fin au plus vite à ces pratiques », évoquant « des dons alimentaires distribués de manière informelle, non encadrée et opaque. »

Les quatre salariés licenciés ne comptent pas en rester là. Ils annoncent avoir saisi les prud’hommes pour contester la procédure. Leur grief ? Un traitement qu’ils jugent injuste, disproportionné, et contraire à l’éthique professionnelle.

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Rédactrice finance

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