L’accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et le Mercosur divise profondément la classe politique française entre ceux qui voient en lui une opportunité économique et ceux qui dénoncent une menace pour la souveraineté nationale et écologique.
Mercosur : opportunité économique ou trahison politique ?
L’accord Mercosur, négocié pendant 25 ans entre l’Union européenne et les pays d’Amérique du Sud, est devenu un sujet majeur de discorde en France. Alors que la Commission européenne présente ce partenariat comme une victoire économique et diplomatique, des voix s’élèvent pour alerter sur ses implications.
Le Mercosur, un moteur pour les exportations européennes
Pour les partisans de l’accord, notamment dans les milieux économiques et au sein de certaines institutions européennes, le Mercosur représente une opportunité inédite. Les entreprises industrielles et pharmaceutiques européennes, fortement exportatrices, devraient bénéficier de la suppression des droits de douane sur leurs produits. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a salué cet accord comme « le début d’une nouvelle ère de coopération transatlantique, où l’Europe renforcera son rôle dans le commerce mondial ».
Les défenseurs du traité insistent également sur l’importance géopolitique de ce partenariat. En renforçant les liens économiques avec l’Amérique latine, l’UE contrebalance l’influence croissante de la Chine dans cette région. Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, a déclaré : « Cet accord n’est pas seulement économique ; il s’agit d’affirmer notre rôle stratégique face à des puissances qui gagnent en influence sur notre voisinage global. »
Les partisans soulignent également les avantages pour les consommateurs européens, qui pourraient bénéficier de produits sud-américains à des prix plus compétitifs. Selon un rapport de la Commission, l'ouverture du marché à des importations de viande, de soja ou de fruits tropicaux pourrait réduire les coûts pour les ménages européens, tout en diversifiant l’offre.
Une attaque contre la souveraineté alimentaire
Pour les opposants, et notamment une large partie de la classe politique française, cet accord menace directement la souveraineté alimentaire de l’Europe. L'importation de produits agricoles sud-américains, produits selon des normes beaucoup moins strictes que celles de l'UE, pourrait déstabiliser les filières locales. Le président de la République, Emmanuel Macron, a exprimé des réserves : « La signature de cet accord ne peut se faire sans des garanties environnementales et sanitaires solides. »
Le syndicat Jeunes Agriculteurs, de son côté, a dénoncé une mise en péril de l’agriculture française. Selon son porte-parole, « cet accord mettra les producteurs européens en concurrence avec des produits issus de modèles agricoles destructeurs et à bas coût, rendant impossible une agriculture durable chez nous. »
L'accord du Mercosur, un désastre écologique
Au-delà des considérations agricoles, les opposants mettent en garde contre les conséquences environnementales. La déforestation massive en Amazonie, souvent liée à l’expansion des cultures agricoles destinées à l’exportation, est au cœur des critiques. Le député écologiste Yannick Jadot a qualifié l’accord de « catastrophe climatique annoncée, incompatible avec les objectifs de neutralité carbone de l’UE. »
Les ONG environnementales, telles que Greenpeace et WWF, appellent également à un rejet pur et simple du traité. Elles reprochent à l’UE de fermer les yeux sur l’impact écologique des pratiques agricoles et industrielles au Brésil, pourtant dénoncées par de nombreux scientifiques.
Un clivage politique marqué en France
La France, qui s'est traditionnellement positionnée comme un rempart contre les excès du libre-échange aux côtés de l'Italie, est profondément divisée sur le Mercosur. Si certains ténors de la majorité présidentielle, comme Bruno Le Maire ,ancien ministre de l'Economie, y voient une opportunité économique, d'autres dénoncent une trahison des valeurs européennes.
Les partis d’opposition, à droite comme à gauche, sont majoritairement contre l’accord. Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, a déclaré : « Cet accord montre une fois de plus que l’UE est prête à sacrifier ses agriculteurs et son environnement sur l’autel de la mondialisation. » À gauche, Jean-Luc Mélenchon a fustigé une politique européenne « asservie aux intérêts des multinationales. »
Les manifestations organisées par les syndicats agricoles et les ONG écologistes ont contribué à maintenir le sujet au cœur du débat public. Plusieurs pétitions ont été lancées pour exiger un référendum sur la ratification de l’accord. Une mobilisation citoyenne qui illustre l’ampleur des préoccupations liées au Mercosur.