Mines antipersonnel : la Pologne et les États baltes veulent à nouveau les utiliser

Un traité signé par plus de 160 pays, un interdit humanitaire vieux de près de trois décennies (1997)… et pourtant, la Pologne et les États baltes annoncent leur intention de s’en retirer. Officiellement, il s’agit de sécurité

Cropped Favicon.png
Par Grégoire Hernandez Publié le 18 mars 2025 à 16h11
mines-antipersonnel-pologne-etats-baltes-ottawa
Mines antipersonnel : la Pologne et les États baltes veulent à nouveau les utiliser - © PolitiqueMatin

« Il n’est pas normal que nous nous interdisions d’utiliser des armes que la Russie est prête à employer contre nous. » Cette déclaration du ministre estonien des Affaires étrangères résume bien l’état d’esprit qui prévaut à Varsovie, Vilnius, Riga et Tallinn.

Une décision historique aux répercussions incertaines

La Pologne et les trois États baltes (la Lituanie, la Lettonie et l'Estonie) ont annoncé le 18 mars 2025 leur volonté de quitter la Convention d’Ottawa, qui interdit l’emploi, le stockage, la production et le transfert des mines antipersonnel. Leur justification ? Pour eux, la menace russe rend ce traité obsolète.
« Nos pays sont prêts et peuvent utiliser toutes les mesures nécessaires pour défendre notre territoire et notre liberté », déclarent les ministres de la Défense dans un communiqué commun. Face à une Russie jugée toujours plus menaçante, ces États frontaliers de Moscou estiment que l’interdiction des mines limite leur capacité de dissuasion.

L’emploi des mines antipersonnel est interdit depuis 1997 en raison de leurs effets dévastateurs sur les civils. En 2023, l’ONG Landmine Monitor recensait 5 757 victimes de mines, principalement des civils. Pourtant, les responsables baltes et polonais soulignent que la Russie n’a jamais signé ce traité et continue d’employer ces armes en Ukraine, transformant ce pays en la nation la plus minée au monde.

Mines antipersonnel : vers une production et une utilisation effectives ?

Les déclarations officielles se veulent rassurantes. Le ministre estonien de la Défense, Hanno Pevkur, affirme que son pays « n’a pas actuellement de projet de développement, de stockage ou d’utilisation de mines antipersonnel ». Même discours du côté letton, qui insiste sur la nécessité de « répondre à la menace russe » sans préciser de plan immédiat.
Cependant, en coulisses, certains responsables évoquent déjà la possibilité d’un redéveloppement industriel rapide des mines dans la région. En Lettonie, le ministère de la Défense indique que la production pourrait être relancée « relativement vite » si la situation l’exige. La Lituanie, quant à elle, a déjà quitté une autre convention interdisant les bombes à sous-munitions, signe d’un durcissement progressif de sa posture militaire.

Si la décision de Varsovie et des États baltes est motivée par la crainte d’une agression russe, elle ne fait pas l’unanimité. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) s’inquiète d’un recul humanitaire majeur et du signal envoyé à d’autres États. Selon Cordula Droege, cheffe juridique du CICR, « alors que les États semblent se préparer à la guerre, nous constatons avec inquiétude une remise en question des traités humanitaires ».
De plus, ce retrait pourrait créer des tensions au sein même de l’OTAN. Jusqu’à présent, la majorité des membres de l’Alliance atlantique adhéraient à la Convention d’Ottawa, à l’exception notable des États-Unis, qui ont toujours refusé de s’engager. Une brèche pourrait donc s’ouvrir, facilitant un retour progressif de ces armes en Europe.

Suivez-nous sur Google News PolitiqueMatin - Soutenez-nous en nous ajoutant à vos favoris Google Actualités.

Aucun commentaire à «Mines antipersonnel : la Pologne et les États baltes veulent à nouveau les utiliser»

Laisser un commentaire

Les Commentaires sont soumis à modération. Seuls les commentaires pertinents et étoffés seront validés. - * Champs requis