Le chantier de l’EPR2 à Penly connaît ses premiers déboires. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASNR) a demandé à EDF de s’expliquer sur la qualité du béton utilisé pour la future digue du site. Ce couac est-il un simple contretemps ou le signe avant-coureur de nouvelles difficultés ?
Centrale nucléaire de Penly : les autorités mettent déjà la pression sur EDF

Penly : un chantier titanesque sous haute surveillance
La construction des nouveaux réacteurs EPR2 à Penly, en Seine-Maritime, est une pièce maîtresse du plan nucléaire dévoilé par Emmanuel Macron en 2022. Destiné à renforcer l’indépendance énergétique du pays, le projet prévoit la mise en service des premières unités d’ici à 2035. Mais avant même le début officiel de cet important chantier, des interrogations surgissent concernant le béton utilisé pour la digue qui doit protéger le site.
L’ASNR, le gendarme du nucléaire, a demandé des comptes à EDF sur la composition de ce béton. En cause, une teneur en silex inférieure aux attentes, un détail technique qui pourrait avoir des conséquences sur la durabilité de l’ouvrage. EDF assure que le béton en cours de fabrication est conforme, mais l’ASNR veut des garanties supplémentaires. Une précaution d’autant plus nécessaire que les EPR2 sont conçus pour fonctionner au moins 60 ans.
Si cette alerte sur le béton peut sembler anodine, elle résonne comme un écho aux multiples difficultés rencontrées sur le chantier de l’EPR de Flamanville. Ce réacteur de première génération accumule... près de treize ans de retard et a vu son coût exploser. Parmi les nombreux déboires, des malfaçons sur le béton avaient été détectées bien trop tard, contraignant EDF à d’importantes corrections.
Le cas de Penly est différent, affirme l’ASNR, qui estime que les contrôles actuels montrent qu’EDF surveille correctement ses sous-traitants. Mais des défauts détectés à ce stade peuvent encore être corrigés, à condition d’être pris au sérieux.
Des enjeux industriels et financiers colossaux
Le chantier des EPR2 représente un investissement estimé entre 70 et 80 milliards d’euros pour six réacteurs. Chaque retard, chaque complication impacte le budget et fragilise un projet censé redonner à la France un rôle central dans l’énergie nucléaire.
EDF, qui doit encore finaliser son montage financier, ne peut pas se permettre une répétition des erreurs de Flamanville. L’État, principal actionnaire, doit d’ailleurs trancher sur les modalités de financement d’ici 2026. Ce point sera abordé lors du Conseil de politique nucléaire prévu ce 17 mars 2025 à l'Élysée par le Président de la République.
Pour l’instant, EDF se veut rassurant : les tests réalisés confirment que le béton utilisé pour la digue est conforme aux exigences techniques. L’ASNR, elle, veille au grain et attend des réponses précises sur la maîtrise du risque de réaction alcali-granulat, qui peut à long terme, fragiliser les structures en béton.
Reste à voir si cette alerte restera un simple ajustement technique ou si elle marque le début d’une série de complications. À Penly, le chantier ne fait que commencer. Mais pour EDF, la pression est déjà maximale.