Loi anti-PFAS : François de Rugy fustige “un Parlement sous influence”

Dans une tribune publiée ce lundi 31 mars 2025 dans Le Figaro, François de Rugy, ancien président de l’Assemblée nationale et ex-ministre de la Transition écologique, dénonce avec virulence la manière dont a été adoptée la loi visant à interdire les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS). Le texte, coécrit avec le journaliste Laurent Lesage, pointe une législation dictée non par la science, mais par “la pression émotionnelle” et “la stratégie militante”, dans un contexte où, selon eux, “l’opinion remplace la raison au Parlement”.

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Par Paolo Garoscio Publié le 1 avril 2025 à 6h36
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Loi anti-PFAS : François de Rugy fustige “un Parlement sous influence” - © PolitiqueMatin

"La loi restera, hélas, le symbole d’une dérive préoccupante", écrivent les deux auteurs, "celle d’un Parlement de plus en plus perméable à la pression émotionnelle et à la stratégie militante plutôt qu’à l’analyse rationnelle et contradictoire."

Cette critique s’ancre dans un constat plus large, partagé par plusieurs chercheurs et analystes interrogés dans la vidéo « Une manipulation derrière la loi anti-PFAS ? », produite par l’émission Et si l’économie sauvait l’écologie ?, à laquelle participe Laurent Lesage. Le chercheur Bruno Améduri, directeur de recherche au CNRS, y affirme n’avoir jamais été consulté par les promoteurs de la loi. Il dénonce un amalgame entre les PFAS dangereux (comme le PFOA) et des composés inertes comme le PTFE, utilisés dans des domaines médicaux ou industriels essentiels.

La tribune revient sur cet effacement du débat scientifique : "Les experts exprimant une vision plus équilibrée ou appelant à distinguer les différents types de PFAS (car il en existe des milliers) ont été marginalisés." Et les auteurs d’ajouter : "Ainsi, le chercheur du CNRS, Bruno Ameduri, l’un des grands spécialistes français du sujet, rapporte que son interview a été écartée du journal télévisé de France 2, sans explication convaincante."

Cette éviction médiatique, déjà largement dénoncée dans la vidéo, alimente la thèse centrale du texte : l’existence d’un récit univoque, imposé au débat public par une "coalition" militante. "Le député vert [Nicolas Thierry] revendique lui-même l’existence d’une ‘coalition’ incluant des ONG militantes (Générations Futures, Notre affaire à tous…), des figures médiatiques comme Camille Étienne et des relais journalistiques complaisants."

La mécanique décrite est celle d’une stratégie d’influence, redoutablement efficace : "Mobiliser l’opinion via les réseaux sociaux et les médias, saturer l’espace public d’un message anxiogène, puis faire pression sur les députés." Et de conclure : "Ce n’est plus la science qui guide le législateur, mais le storytelling. Ce n’est plus la vérité, mais la narration."

La charge ne s’arrête pas au cas des PFAS. François de Rugy et Laurent Lesage y voient un précédent dangereux. "Ce n’est pas seulement un problème de méthode, c’est une menace pour la démocratie représentative elle-même", écrivent-ils. Et d’alerter : "Lorsque le diagnostic est mal posé, la réponse politique ne peut être que mauvaise."

Cette tribune s’inscrit dans un débat plus large, qui dépasse les seuls PFAS. Elle fait écho à une série d’alertes sur la manière dont certaines causes environnementales sont médiatisées puis traduites en législation, sans prise en compte des réalités scientifiques ni des conséquences industrielles.

Dans la vidéo précitée, un représentant du secteur textile explique ainsi que la loi rendra invendables des stocks déjà produits, menaçant des entreprises françaises pourtant encore actives. Téfal, particulièrement visée par la campagne, rappelle que le PTFE qu’elle utilise représente "0,5 % des PFAS utilisés en Europe", et qu’aucune alternative n’est aujourd’hui viable à grande échelle.

Les auteurs de la tribune s’inquiètent enfin du précédent démocratique : "À l’heure où l’on s’inquiète, à juste titre, des ravages des fake news, des campagnes de désinformation ou des discours antiscience venus d’Outre-Atlantique, balayons aussi devant notre porte." Et de conclure par une mise en garde cinglante : "La désinformation ne porte pas toujours une casquette rouge ‘MAGA’. Elle peut aussi s’habiller de vert, s’exprimer sur un plateau télé, et s’infiltrer dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale."

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Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013. Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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