La Pologne réclame des têtes nucléaires aux États-Unis

L’ armée polonaise, une démonstration de force

La Pologne n’a pas attendu pour réarmer massivement. Depuis plusieurs années, son armée est l’objet d’un rééquipement sans précédent sur le continent. En 2025, elle est devenue la troisième force militaire de l’OTAN, derrière les États-Unis et la Turquie, avec plus de 200.000 soldats et un budget de défense équivalant à 4,7 % du PIB.

Le 11 mars 2025, le Premier ministre Donald Tusk a dévoilé un plan de formation militaire « de facto de réservistes », visant à former jusqu’à 100.000 volontaires par an d’ici 2027. « En 2027, nous serons en mesure de former 100.000 volontaires par an. Je suis convaincu que les candidats ne manqueront pas », a-t-il affirmé dans Le Figaro. Le pays veut constituer une armée capable d’encaisser une attaque russe sans dépendre intégralement de ses alliés. Et surtout, envoyer un signal fort à Moscou, Washington et Bruxelles.

L’arme nucléaire dans le viseur

Mais ce réarmement conventionnel ne suffit plus. Le 13 mars 2025, dans une interview au Financial Times rapportée par Les Échos, le président Andrzej Duda a franchi un cap : « Les frontières de l'Otan ont été déplacées vers l'est en 1999. Vingt-six ans plus tard, l'infrastructure de l'Otan devrait donc également être déplacée vers l'est. Pour moi, c'est une évidence ». Andrzej Duda évoque ainsi une intégration au nuclear sharing de l’OTAN, qui permet déjà à des pays comme l’Allemagne ou la Turquie d’héberger des ogives nucléaires américaines.

La Pologne veut accueillir des armes nucléaires sur son territoire, dans le cadre de l’OTAN. Mais l’exécutif polonais ne s’arrête pas là. Le Premier ministre Donald Tusk, dans un discours prononcé au Parlement le 7 mars 2025 et relayé par le New York Times, a enfoncé le clou : « Il est temps pour nous de regarder avec audace les possibilités de posséder les armes les plus modernes », y compris nucléaires. Il n’exclut plus non plus de négocier un élargissement du parapluie nucléaire français, seule option européenne crédible selon lui : « Nous discutons sérieusement avec la France », a-t-il précisé.

Un jeu d’équilibriste avec Washington, Moscou et Bruxelles

La requête polonaise pose évidemment problème à Washington, qui jusqu’ici a toujours refusé de stationner des armes nucléaires dans les anciens pays du bloc soviétique. La doctrine américaine considère qu’un tel déploiement dans un État comme la Pologne constituerait une provocation directe à l’égard de la Russie. Mais dans l’ombre de Donald Trump, revenu à la Maison Blanche, l’Europe tremble.

Le New York Times rapporte que Varsovie voit désormais la situation comme plus périlleuse qu’en 2022 : « Aujourd’hui, la situation de la Pologne et surtout de l’Ukraine est objectivement plus difficile qu’il y a quelques mois », a déclaré Donald Tusk. Entre les menaces russes et les incertitudes américaines, la Pologne ne veut plus être la variable d’ajustement de la dissuasion occidentale. Cette montée en puissance nucléaire est donc aussi un message à l’Europe. Soit le continent se dote d’un bouclier stratégique crédible, soit Varsovie envisage de se débrouiller seule.