Une nouvelle polémique tourne les regards des Français vers les prisons : le 27 juin, certains prisonniers de Toul, en Meurthe-et-Moselle, pourraient bénéficier d’une sortie au château de Versailles. Une proposition culturelle qui agace les Français et inquiète les forces de l’ordre.
Prisonniers en visite à Versailles : les Français ne digèrent pas
Un long trajet qui rappelle l'évasion de Mohamed Amra
Toul est à 350 km de Versailles, et les prisonniers doivent être acheminés en bus. L'activité devrait concerner entre dix et quinze détenus, accompagnés de trois agents pénitentiaires, soit un gardien pour trois à cinq détenus. Un encadrement qui paraît insuffisant, même s'il est prévu que les participants soient « triés sur le volet », selon les termes d'Éric Dupont-Moretti, ministre de la Justice. À titre de comparaison, en colonie de vacances, la loi impose un animateur pour huit enfants de moins de 6 ans, ou un pour douze enfants de 6 ans et plus. Cependant, alors que les enfants sont en général satisfaits de leur sort, les détenus peuvent chercher à s'évader, avec des stratégies d'autant plus efficaces qu'ils ne sont justement pas des enfants.
Ainsi, les forces de l'ordre s'insurgent. « On organise le déplacement de détenus condamnés à de longues peines pour des crimes ? Qui ne rêvent que de liberté ? Et avec trois accompagnateurs ? On marche sur la tête », s'exclame un agent. Les craintes des policiers sont exacerbées par l'évasion récente de Mohamed Amra, qui a montré que la sécurité des détenus, particulièrement pendant les transports à l'extérieur, ne bénéficie pas toujours des moyens nécessaires. Or, même si les détenus concernés par la sortie sont moins dangereux que Mohamed Amra, la prison de Toul rassemble majoritairement des peines de plus d'un an de prison, sanctionnant des viols ou des meurtres.
La réinsertion des prisonniers, un serpent de mer
La sortie au château de Versailles des prisonniers de Toul et la polémique qu'elle engendre s'inscrit dans un vieux serpent de mer : la réinsertion. Elle fait partie des cinq fonctions de la peine carcérale, qui sont, dans l'ordre :
- La neutralisation du délinquant, supposé ne pas pouvoir commettre de nouveaux crimes et délits s'il est en prison. Une conception qui peut notamment être remise en question par la facilité d'accès à un téléphone portable, ce qui peut permettre la continuité d'un trafic de drogue par exemple.
- La dissuasion, la prison doit ôter l'envie au délinquant et à son entourage de récidiver. Cela implique que la prison soit un environnement difficile.
- La rétribution, ou la réparation symbolique du crime ou du délit commis. Là encore, cela implique que les Français voient la prison comme un environnement peu enviable.
- La réparation aux victimes, puisque le prisonnier, par son travail, doit pouvoir indemniser les victimes.
- La réinsertion : ce point ne vient donc qu'en dernier. Il concerne les prisonniers qui respecteront la loi à leur sortie, et doivent être aidés à retrouver un travail.
Dans cette optique, on peut se demander pourquoi la réinsertion passe par des sorties culturelles ou la venue d'association culturelles et sportives dans les prisons. Si le travail et la formation font également partie des activités de réinsertion, certains estiment que ces domaines devraient prendre plus de place, voire toute la place.