A quoi ça sert les impôts ? La moitié des Français n’en a aucune idée

Alors que la campagne de déclaration de revenus (impôts) vient de s’ouvrir, un baromètre d’opinion interroge la légitimité de l’impôt dans l’esprit des Français. Si la fonction régalienne de la fiscalité ne fait pas débat, sa traduction concrète en matière de services publics et de redistribution semble, pour beaucoup, poser question.

Jade Blachier
Par Jade Blachier Publié le 11 avril 2025 à 14h41
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Le 11 avril 2025, en ouverture de la campagne annuelle de déclaration des revenus, un baromètre réalisé par Odoxa pour BFM Business et Capital met en lumière un diagnostic préoccupant : une large majorité de Français ne perçoit plus clairement le sens ni le retour concret de leur contribution fiscale. Dans un contexte budgétaire exigeant, cette évolution interpelle les responsables politiques sur le lien entre fiscalité, efficacité publique et consentement citoyen.

Une perception affaiblie des impôts

Selon cette enquête, 65 % des personnes interrogées considèrent que le montant de leurs impôts n’est pas justifié au regard de la qualité des services publics et de la protection sociale. Ce jugement s’accompagne d’un autre constat : moins de six Français sur dix déclarent savoir à quoi servent précisément leurs impôts. Cette méconnaissance alimente un sentiment de déconnexion entre la charge fiscale et les missions régaliennes ou sociales qu’elle permet de financer.

La fonction première de l’impôt, assurer les recettes nécessaires au fonctionnement des institutions et à la redistribution des richesses, est en principe largement admise. Il participe au financement de l’éducation, de la santé, de la sécurité, de la justice, ainsi que des dispositifs de solidarité nationale. Mais l’écart entre cette finalité théorique et sa perception dans la vie quotidienne tend à se creuser, notamment en période d’inflation des dépenses publiques et de dégradation ressentie de certains services essentiels.

Une pression fiscale structurellement élevée

Le débat autour du niveau de prélèvement obligatoire en France n’est pas nouveau. Selon les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la France figure régulièrement parmi les pays où le taux global d’imposition rapporté au produit intérieur brut est le plus élevé.

Cette réalité macroéconomique se traduit par une perception d’augmentation continue des impôts. Toujours selon le baromètre Odoxa, 84 % des personnes sondées estiment que les prélèvements ont progressé ces dernières années, et 92 % s’attendent à ce qu’ils continuent à croître dans un avenir proche. Une anticipation qui s’explique en partie par le discours ambiant sur la maîtrise des finances publiques, la hausse programmée des dépenses liées à la défense ou à la transition énergétique, et la nécessité de respecter les engagements européens de réduction des déficits.

Préférences fiscales contrastées

Interrogés sur les voies potentielles d’ajustement fiscal, les répondants expriment des préférences fragmentées. Une part significative (39 %) serait davantage favorable à une hausse de la fiscalité sur l’épargne, tandis que 30 % préfèreraient un ajustement sur l’impôt sur le revenu, et 28 % une majoration de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Ces résultats traduisent une absence de consensus sur les leviers à privilégier, et mettent en évidence les lignes de fracture socio-économiques dans le rapport à l’impôt.

Le choix d’un type de fiscalité reflète souvent la position socio-économique du contribuable : les non-épargnants se montrent plus enclins à taxer le capital, tandis que les classes moyennes actives, fortement contributrices à l’impôt sur le revenu, expriment une saturation fiscale.

L’épargne, révélateur d’une insécurité budgétaire latente

Cette défiance s’inscrit dans un contexte d’inquiétude plus large lié à l’épargne. Le même baromètre indique que 62 % des Français se disent préoccupés par le rendement de leur épargne. Alors que 77 % déclarent mettre de l’argent de côté en avril 2025, soit un record sur cet indicateur, les produits d’épargne traditionnels, assurance-vie et Livret A, ne répondent plus aux attentes de rentabilité. La perspective d’une baisse de leur rendement nourrit la crainte d’un appauvrissement progressif du capital des ménages.

En parallèle, la crainte d’un alourdissement de la fiscalité pesant sur l’épargne est partagée. Le capital, souvent considéré comme un amortisseur en période d’instabilité économique, est perçu comme exposé à une taxation accrue pour financer les besoins croissants de l’État.

Un rendez-vous fiscal annuel maintenu malgré les incertitudes

Le lancement de la campagne de déclaration des revenus, ouvert depuis le 11 avril 2025, marque comme chaque année un moment structurant dans la relation entre administration fiscale et citoyens. Le site impots.gouv.fr centralise les démarches, désormais majoritairement réalisées en ligne. Le système de prélèvement à la source, généralisé depuis 2019, a facilité la régularité des paiements mais n’a pas supprimé les interrogations sur le niveau des montants dus.

En 2023, près de 18 milliards d’euros ont été restitués aux foyers fiscaux sous forme de réductions ou crédits d’impôt, soit environ 23 % des recettes de l’impôt sur le revenu, selon les chiffres rappelés par les autorités. Ces mécanismes compensatoires visent à corriger certaines inégalités de situation, en particulier pour les familles, les personnes dépendantes ou les contribuables qui engagent des dépenses favorisant l’intérêt général.

Parmi les dispositifs les plus mobilisés figurent notamment la déduction des pensions alimentaires versées à un enfant majeur, les crédits d’impôt pour l’emploi à domicile, les frais de garde et de scolarité des enfants, les dépenses en établissements spécialisés pour les personnes âgées, ou encore les dons aux associations reconnues d’utilité publique. La pluralité de ces mesures témoigne d’un effort de ciblage fiscal, bien que leur lisibilité demeure parfois critiquée.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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