ZFE : les Français vont-ils l’emporter ?

Les ZFE, cheval de bataille de la mouvance écologiste depuis presque vingt ans, pourraient bientôt être de l’histoire ancienne. Les députés ont voté leur suppression en commission.

Adelaide Motte
Par Adélaïde Motte Publié le 27 mars 2025 à 9h11
zfe
@shutter - © PolitiqueMatin

Mercredi 26 mars, en commission spéciale portant sur le projet de loi de simplification, les députés ont voté la suppression des Zones à faibles émissions (ZFE), ces espaces au sein des villes dont certains véhicules considérés comme trop polluants sont exclus.

Clap de fin pour les ZFE ?

Alors que le gouvernement macroniste soutient les ZFE, les Républicains et le Rassemblement National se sont rejoints dans le vote d'amendements permettant de mettre fin à cette mesure écologiste. Ils ont été rejoints par certains députés des groupes macronistes, Horizons, UDR et LIOT. Plusieurs députés de gauche se sont également abstenus. Au total, le vote en commission s'est soldé par 26 voix pour, 11 contre et 9 abstentions.

Les ZFE sont supposées inciter les Français à acheter des véhicules peu polluants afin de pouvoir accéder à tous les espaces urbains. Ainsi, un véhicule non-autorisé, c'est-à-dire affichant une vignette Crit'Air trop élevée, ou pas de vignette du tout, s'expose à 135 euros d'amende. Cela afin d'améliorer la qualité de l'air et de limiter les émissions de particules fines.

Les ZFE, une mesure qui divise les Français

Cependant, la réalité est bien différente. Nombre de Français n'ont tout simplement pas les moyens d'acheter ces fameuses voiture à Crit'Air faible, y compris en occasion. Le système des ZFE est ressenti comme déconnecté des aspirations et possibilités réelles de la population. Au reste, si les Français ont une voiture polluante, ce n'est bien souvent pas un choix. Ian Boucar, député Droite républicaine, déplore ainsi que certains ménages doivent « choisir entre des coûts supplémentaires importants pour acheter un nouveau véhicule propre ou renoncer à se déplacer. » 

En France, d'après l'Insee, 38% des ménages les plus pauvres possèdent un véhicule classé Crit'Air 4 ou 5. L'extension des ZFE exclue donc près de la moitié des ménages modestes des villes.

Un paysage politique fragmenté

Le gouvernement continue pourtant à défendre ces zones, initiées en 2019 par la Loi d'orientation des mobilités, pendant le premier mandat d'Emmanuel Macron, et étendues en 2021 par la Loi Climat. Marc Ferracci, ministre de l'Industrie et de l'Energie, a notamment affirmé que « un certain nombre d’expériences, en particulier à l’étranger, ont montré que les ZFE ont un effet […] sur la réduction des émissions. » Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, a quant à elle assuré que « dans les deux agglomérations où les ZFE sont effectives, soit celles de Lyon et Paris, la concentration de dioxyde d’azote a été réduite de plus d’un tiers. »

Pierre Meurin, député RN, a affirmé que les ZFE « sont inutiles pour améliorer la qualité de l’air et créent une forte blessure sociale, un séparatisme territorial ». Laurent Wauquiez, chef du groupe Droite républicaine, qualifie même ces ZFE de « bombe à fragmentation territoriale. » La droite n'est d'ailleurs pas la seule à s'élever contre le projet du gouvernement de bannir les véhicules trop polluants des villes. Sylvain Carrière, député insoumis de l'Hérault, a suggéré la suspension des ZFE, constatant qu'il existait de nombreux espaces où la voiture n'avait pas d'alternative. Même dans le camp présidentiel, le sénateur Horizons Vincent Louault souhaite que l'instauration des ZFE revienne aux collectivités elles-mêmes.

Une suppression saluée par les Français

Bien que le projet de loi doive encore être adopté par l'Assemblée, certains Français et automobilistes se réjouissent de ce pavé lancé dans la mare. L'association 40 millions d'Automobilistes a ainsi déclaré se réjouir de « cette victoire décisive pour les automobilistes. Nous avons réussi à faire entendre notre voix contre une mesure injuste qui mettait à mal des millions de conducteurs. »

Cependant, la suppression des ZFE pourrait bien, si elle passait la barrière du Sénat et de l'Assemblée, se heurter au Conseil d'Etat, et même au droit européen. En effet, l'Europe oblige ses Etats membres à mettre en place des ZFE, où leur équivalent.

Adelaide Motte

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

Suivez-nous sur Google News PolitiqueMatin - Soutenez-nous en nous ajoutant à vos favoris Google Actualités.

Aucun commentaire à «ZFE : les Français vont-ils l’emporter ?»

Laisser un commentaire

Les Commentaires sont soumis à modération. Seuls les commentaires pertinents et étoffés seront validés. - * Champs requis